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Généalogie d’une pensée de l’utopie musicale autour de 1800. Aux origines de l’esthétique musicale d’Arthur Schopenhauer 

Laure Gauthier
février 2014

DOI : https://dx.doi.org/10.56698/filigrane.627

Index   

Texte intégral   

1La métaphysique de la musique telle que l’a formulée Arthur Schopenhauer notamment dans le Livre III du Monde comme volonté et comme représentation a exercé une influence profonde et durable sur la pensée musicale du XIXe siècle – on pense aux débats autour du formalisme et de la musique pure opposant Wagner à Hanslick après 1850 - mais aussi, dans la première moitié du XXe siècle, autour de la formulation d’une utopie musicale. Ainsi Ernst Bloch, même s’il dépasse la philosophie pessimiste de Schopenhauer, multiplie dans L’Esprit de l’Utopie les références à sa philosophie de la musique, notamment dans les pages consacrées à la chose en soi dans la musique ou les passages sur l’ « obscur le plus conscient »1.

2Néanmoins, il est également important d’envisager la philosophie de la musique développée par Arthur Schopenhauer avec les moments utopiques qu’elle renferme non pas comme l’inspiratrice d’utopies musicales futures, mais comme le dépassement de la philosophie de la musique élaborée autour de 1800 par différents représentants du Premier romantisme allemand. La prise en compte de l’apport philosophique du Premier romantisme doit en effet permettre de reconsidérer les moments utopiques qui émergent de la métaphysique de la musique du Monde comme volonté et comme représentation2, telle que Schopenhauer l’expose dans la première édition du Monde, publié en 1819, et la précise dans les Suppléments de l’édition de 1844.3

3C’est dans les Ėpanchements d’un prêtre ami des arts et surtout dans les Fantaisies sur l'art de Wilhelm Heinrich Wackenroder et Ludwig Tieck, datant respectivement de 1797 et de 1799,4 que la suprématie du langage des sons sur les autres arts est affirmée. Plus précisément, la musique instrumentale devient le fondement d’une nouvelle foi en l’art qui comporte un geste utopique, en ce qu’elle fait signe vers l’infini et l’absolu, voire se confond avec ceux-ci. Nous verrons que la musique telle que les poètes proches des cercles de l’Athenäum – principalement Wilhelm Heinrich Wackenroder et Ludwig Tieck mais aussi Friedrich Schlegel et Novalis - la conçoivent, et telle que, dans leur sillage E.T.A. Hoffmann la définit en 1810, dans un article sur la Cinquième symphonie de Beethoven5, porte une double aspiration : elle est un langage qui communique à l’auditeur la « nostalgie » (« Sehnsucht ») d’un paradis perdu, et le sombre pressentiment (« dunkle Ahnung ») d’une unité entre l’homme et l’univers qui doit advenir à la fin des temps et dont la musique porte l’aspiration. L’utopie se mêle à une u-chronie, la sphère musicale extérieure au monde est située en dehors du temps réel.

4Il conviendra de confronter cette recherche romantique d’un avant et d’un après le monde, avec la métaphysique de la musique qu’Arthur Schopenhauer met en place dans Le Monde. Au sein d’une pensée pessimiste du monde, celui-ci déploie une conception originale de la musique instrumentale qui comporte un fort moment utopique. Il s’agira de déterminer en quoi la définition de ce qu’il conviendra d’appeler une « sphère musique », indépendante du monde phénoménal comme de la volonté, est liée chez le philosophe allemand non pas à une u-chronie, la musique ne pouvant se déployer dans le temps ni désigner un à-venir meilleur, mais à une utopie de la connaissance, la désignation d’une sphère certes indépendante du monde phénoménal, mais qui nous arrache à la finitude afin de nous permettre de mieux appréhender, du dehors, le monde.

La métaphysique de la musique instrumentale du Premier romantisme allemand : l’au-delà du langage

5L’esthétique caractérisant le Premier romantisme allemand est liée à une conception pessimiste de la modernité ressentie comme moment historique caractérisé par la perte de l’unité entre le monde et l’homme.6 Cette conscience aiguë de la crise n’a pas nourri que des constats pessimistes sur l’époque moderne, mais a également donné lieu à l’élaboration d’utopies dans de nombreux domaines, notamment en politique - on pense à La Chrétienté ou l’Europe. Un fragment où Novalis esquisse en 1799 les grandes lignes d’une utopie politique romantique. La conscience de la perte s’assortit très vite, dès 1797, d’un enthousiasme pour l’art qui trouve en la musique son expression la plus exacerbée. Si la théorie de la Poésie universelle, développée notamment par Novalis et Friedrich Schlegel, est bien connue, la métaphysique de la musique instrumentale mise au point par les premiers romantiques allemands l’est moins. Il convient de rappeler que les Ėpanchements d’un moine ami des arts et les Fantaisies sur l’art constituent l’une des sources principales de l’esthétique à la fois picturale et musicale du romantisme européen. La musique y est postulée comme l’art romantique par excellence.7 Les deux essais rédigés par Wilhelm Heinrich Wackenroder et complétés par Ludwig Tieck intègrent les débats sur la musique à une esthétique, mais aussi à une philosophie de l’histoire, liée à la pensée de l’avènement d’un nouvel âge d’or.

6Pour la peinture et la musique, Wackenroder constate que le XVIIIe siècle est le siècle de la décadence, car il a perdu dans un même temps la foi en Dieu et la foi en l’art. La musique sacrée a été progressivement vidée de sa substance pour ne devenir qu’une pratique sociale. Pour lui, l’époque de Palestrina constituait un moment d’équilibre entre sentiment de Dieu et foi en l’art. Toutefois, pour la musique, le bilan est différent : un virage optimiste est en effet amorcé dès les Fantaisies dont les articles sur la musique ont été corrigés voire pour certains, intégralement rédigés par Ludwig Tieck, moins marqué par le piétisme que son jeune ami, entretemps défunt, Wackenroder. Si la musique sacrée ne révèle plus l’absolu comme du temps de Palestrina, en revanche, une nouvelle musique, instrumentale cette fois, se développe autour de 1800, qui surpasse en perfection tous les répertoires passés. La nouvelle musique, profane et instrumentale, parvient plus que tout autre art à imposer un nouveau langage, abstrait et mathématique. Ce logos permet à l’auditeur de s’arracher au monde des apparences pour atteindre l’absolu.

7Comme dans les autres débats esthétiques, Tieck et Wackenroder posent la question de la médiation. Cependant, dans les deux traités, qui exposent une pensée non systématique, la musique est à la fois logos et topos, mais à aucun moment les deux termes du débat ne sont fixés conceptuellement, le langage des sons étant présenté à la fois comme un vecteur qui mène à l’infini, mais parfois aussi comme une sphère infinie. À l’image du fragment qui est – chez Novalis et Friedrich Schlegel à la fois partie de la totalité et totalité lui-même,8 l’œuvre de musique instrumentale conduit à l’absolu et se confond elle-même, par instant, le temps de l’écoute, avec l’absolu.

8Pour Tieck, la musique instrumentale se distingue des autres arts, notamment de la peinture et de la poésie, lesquels paraphrasent les actions humaines, imitent les sentiments en les exprimant à l’aide de mots ou d’images. La musique instrumentale, elle, ne se compromet pas avec le monde fini : si elle nous donne l’impression qu’elle parvient, mieux que tout art, à dépeindre les contradictions du cœur humain, c’est parce qu’elle les exprime de façon abstraite. L’argumentation de Tieck anticipe les aphorismes de Friedrich Schlegel qui soulignent que la musique instrumentale exprime des sentiments « in abstracto », pour ainsi dire en les dématérialisant9, rejoignant ici Novalis pour qui l’art doit être débarrassé de la peinture d’affects concrets, qu’il compare à des maladies.10 La musique est donc l’art le plus merveilleux « parce qu’elle nous montre tous les mouvements de notre âme désincarnés, enveloppés de nuées d’or d’harmonies sublimes et aériennes »11.

9Dans les Fantaisies sur l’art, l’affirmation de l’autonomie du langage musical débouche sur une métaphysique de la musique instrumentale qui culmine en une apologie de la forme symphonique.12 Le tournant esthétique est annoncé aux chapitres huit (« Les sons ») et neuf (« Symphonie »).Le geste utopique, la force de désignation d’un ailleurs merveilleux, réside précisément dans la spécificité du matériau sonore qui n’a pas besoin de références extramusicales pour transporter l’auditeur hors du monde fini. Il peut notamment se passer des mots qui, toujours, restent prisonniers de l’esprit humain et de ses catégories finies. Tandis que le mot trace des limites et sépare, la musique transcende les frontières de l’esprit et, en se détachant du mot, s’élève jusqu’au pressentiment de l’infini, avec lequel elle se confond.13

10La musique en ce qu’elle unit un matériau sensible et naturel – le son - et un langage mathématique – les lois de l’harmonie -, apparaît aux auteurs proches de l’Athenäum comme l’art le plus chargé d’« esprit céleste »14. Ainsi August Wilhelm Schlegel déclare-t-il en 1801 dans sa Théorie esthétique au sujet de la musique :

"Elle purifie pour ainsi dire les passions de leur souillure matérielle en les représentant dans leur forme même, sans aucun rapport à des objets, et une fois qu'elles sont débarrassées de leur enveloppe terrestre, les laisse respirer le pur éther"15.

11La valorisation de la pureté du matériau sonore débouche sur une critique de l’opéra, plus précisément sur une dévalorisation du livret. Berglinger, le prêtre-compositeur des Ėpanchements et des Fantaisies fonde son rejet de ce genre pluriel à l’occasion d’une mise en musique de Macbeth16 : les dialogues éveillent en lui des images individuelles et concrètes, tandis que la partition fait, dit-il, surgir des images universelles et abstraites.17 Ainsi la symphonie est-elle postulée comme la forme musicale suprême car les sons peuvent s’y déployer avec une entière liberté. C’est le lieu de la musique pure, vidée de toutes ses fonctions et de ses déterminismes, critique évidente de la musique à programme18, comme E.T.A. Hoffmann la développe quelques années plus tard19. Tandis que les dialogues du livret expriment des passions particulières, la musique d’un opéra dépasse, selon Hoffmann, le particulier et habille les sentiments du « manteau pourpre du romantisme » pour mener l’auditeur vers « le règne de l’infini », vers le royaume de la pure poésie.20

12Avec Hoffmann, la philosophie de la musique romantique, qui postulait jusqu’ici a priori une musique pure, trouve en Beethoven un compositeur qui incarne son idéal et annonce une nouvelle ère musicale. La modernité est certes conçue comme le temps de la perte de l’unité, mais la musique instrumentale qu’elle voit naître, exprime paradoxalement de la façon la plus parfaite l’unité secrète qui reliait jadis le monde, le moi et l’univers. Hoffmann souligne qu’à partir du langage abstrait de la « Cinquième Symphonie », Beethoven appréhende l’essence du cœur humain et de l’univers et parvient à désigner intuitivement cet ailleurs que les concepts et la raison sont incapables de saisir :

"La musique ouvre à l’homme un royaume inconnu ; un monde qui n’a rien en commun avec le monde extérieur des sens qui nous entoure, et dans lequel il va abandonner tous les sentiments qui se définissent en des concepts afin de s’adonner à l’indicible"21.

13Cette valorisation du langage musical comme forme permettant d’atteindre l’absolu non par la spéculation mais par l’intuition et les sentiments, formulée entre 1797 et 1810 par les poètes romantiques allemands, constitue une rupture radicale avec l’esthétique kantienne.22 En effet, dans le paragraphe consacré à la « Comparaison de la valeur respective des beaux-arts »23 de la Critique de la Faculté de Juger (1790), le philosophe affirme précisément que l’opéra est un art supérieur en tant qu’il rend possible la combinaison de plusieurs disciplines.24 Cette valeur que Kant reconnaît à l’opéra, il la refuse à la musique non accompagnée de poésie. L’effet sensuel de la musique instrumentale n’a pas de durée, il est instantané et anéantit ainsi le caractère construit et mathématique de la forme. Essentiellement du ressort du sensible, la musique est exclue du domaine des idées esthétiques et obtient parmi les beaux-arts la « dernière place »25.

14Pour les poètes proches de l’Athenäum en revanche, la musique en général, et plus particulièrement la musique instrumentale, a le pouvoir de nous arracher, le temps de l’écoute, au monde fini et donc au temps. C’est ce qu’illustre Tieck dans le « Conte oriental merveilleux d’un saint-homme nu » qui ouvre les chapitres consacrés à la musique dans les Fantaisies sur l’art26 : un saint écoute inquiet, jour et nuit, le mouvement du temps qui s’écoule de façon uniforme et mécanique. Rongé par une immense angoisse devant l’existence, il est empli d’une insatiable nostalgie, aspirant à retrouver l’unité perdue entre l’homme, le ciel et l’univers. Mais par une nuit d’été, retentit dans le ciel une musique éthérée provenant de cors et d’instruments magiques qui viennent délivrer le saint de son enveloppe terrestre, apaiser sa nostalgie et interrompre la roue du temps.27

15Si la musique permet d’arracher l’homme au temps du calendrier, elle le dérobe aussi géographiquement au monde philistin pour lui offrir, un ailleurs paradisiaque. La musique est présentée tantôt comme le vecteur de cette arrachée au monde, l’intermédiaire entre fini et infini, tantôt comme une sphère hors du monde fini. Aussi Tieck et Wackenroder affirment-ils dans les Fantaisies que la musique est une « joyeuse petite île verte, resplendissant de soleil, de chants et de sonorités, qui flotte sur un océan abyssal et obscur »28. Cette « île musique » est-elle une Ile de Nulle Part ? Elle est indéniablement un lieu hors de tout lieu, qui n’existe nulle part sur terre. Mais chez les romantiques, à la différence de chez Thomas More, il n’existe pas de topographie précise du rêve ; le rêve musique est protéiforme, formulé en des images toujours renouvelées qui ne sont pas sans se contredire, parfois. Ainsi la musique est-elle successivement comparée à une île, à un rayon de soleil qui mène à l’infini, à une nuée d’éther ou tout simplement à un rêve.29 C’est que, à l’instar du fragment-hérisson défini par Friedrich Schlegel, l’œuvre musicale, est à la fois close sur elle-même et ouvrant sur l’infini, à la fois intermédiaire et infini elle-même, donc île et rayon, successivement ou simultanément.  

16Cette force de désignation dont est dotée la musique est tantôt envisagée en des termes hérités du christianisme, notamment chez Wackenroder, encore très influencé par le piétisme, notamment de Friedrich Schleiermacher, ou bien en des termes empruntés à la mythologie païenne. Ainsi peut-on alternativement lire dans les Ėpanchements et dans les Fantaisies que le langage des sons est un oracle, dévoilant aux hommes l’indicible, l’obscur et le mystère,30 que la musique par ailleurs est semblable à « la harpe de Dieu »31 qui nous conduit « hors de la vie au royaume de l’infini »32. La musique recouvre alors une dimension prophétique. On devine ici le tournant esthétique, esquissé avec le Sturm- und Drang, annonçant une religion de l’art qui se manifestera tout au long du XIXe siècle, où l’artiste est conçu comme prophète et l’art apparaît comme une prophétie.33 Mais la prophétie est à la fois prospective et rétrospective, sous-tendue par un mouvement dialectique qui s’exprime dans le sentiment de nostalgie (« Sehnsucht ») dont nous emplissent les sons : la « Sehnsucht » est souvenir d’une unité perdue, ce « All-Einssein » décrit par le philosophe de la nature Schelling qui a fortement influencé toute la génération des poètes réunis autour de Novalis34 et que la musique communique plus que n’importe quel autre art35 ; par ailleurs, transparaît dans le sentiment qu’éprouve celui qui entend de la musique l’aspiration à une unité à venir. Le langage des sons porte ainsi une double aspiration : il renvoie à un monde non encore advenu, il est ce langage « que personne n’a encore jamais parlé et dont nul ne connaît l’origine »36, mais il rappelle aussi un temps immémorial, aux origines du monde, qui laisse transparaître derrière les notes cette « ancienne langue que notre esprit comprenait autrefois et qu’il apprendra de nouveau à l’avenir »37.

17Ce royaume infini que nous ouvrent les sons est envisagé à son tour en des termes qui mêlent les évocations du mythe païen de l’âge d’or et des termes repris de la conception chrétienne du paradis ou de la fin des temps. Ainsi la représentation romantique de l’âge d’or est-elle tripartite et correspond-elle au schéma ternaire de l’Histoire du Salut. La poésie romantique oscille entre la nostalgie d’une unité perdue dont l’art donne souvenance (Sehnsucht) et l’annonce quasi millénariste d’un retour de l’âge d’or dont la musique donne le pressentiment (Ahnung). La musique instrumentale et la symphonie sont nées de la modernité ; elles sont ainsi les formes musicales et artistiques qui portent à leur paroxysme l’expression de cette aspiration dialectique, cette utopie bicéphale, tourné à la fois vers l’origine des temps et la fin du monde.

Schopenhauer et la métaphysique de la musique comme utopie de la connaissance

18Les paragraphes du Monde comme volonté et comme représentation consacrés à la musique s’inscrivent, pour ce qui est de l’absolutisation de la musique, principalement instrumentale, vis-à-vis des autres arts, dans le prolongement de l’esthétique de Tieck et de Wackenroder, et constituent, de ce fait, une rupture radicale avec la conception kantienne. En effet, si Schopenhauer place la musique « en dehors des autres arts », c’est parce qu’il juge que celle-ci est « le plus puissant de tous les arts »38 un art dont l’ « action est plus forte, plus rapide, plus infaillible et plus nécessaire »39 que celle des autres disciplines artistiques.

19Tandis que la raison cherche des causes aux phénomènes, détermine ce qui les relie et reste ainsi enfermée dans le particulier et le monde phénoménal qu’elle tente d’appréhender au moyen de concepts, les arts permettent, eux, de connaître le monde via les idées. Ainsi celui qui contemple l’art peut-il saisir intuitivement des généralités sans pour autant avoir recours aux concepts. Il échappe à la tyrannie de la volonté pour devenir un sujet connaissant pur.40 La volonté s’objective alors, elle devient pour le sujet, objet de la connaissance.

20Le temps de la contemplation esthétique, le sujet échappe à un monde phénoménal qui, soumis à la volonté aveugle, oscille entre ennui et souffrance. Le récit du monde que livre Schopenhauer s’apparente à une dystopie, à une contre-utopie dominée par le dictat de la volonté qui, lorsqu'elle n'est pas objectivée par la contemplation de l’art, soumet l’homme aux caprices du désir incessant puis à la frustration, un cauchemar répétitif caractérisant le présent éternel auquel l’homme ne peut échapper. L’esthétique de Schopenhauer donne lieu, comme chez Kant, à une classification très précise des différents arts : hormis la musique, tous sont classés selon les différents degrés d’objectivation de la volonté qu’ils rendent possibles, depuis l’architecture, qui correspond à la pesanteur, le plus bas degré de la volonté, jusqu’à la poésie notamment dramatique, qui constitue le plus haut degré de la volonté et représente l’idée de l’homme.

La musique, logos et / ou topos hors du monde ?

21La fin du Livre III, consacré à la musique, tout comme les Suppléments41, souligne en revanche le statut d’exception de la musique, qui ne rentre pas dans cette typologie car elle se tient à l’écart de la volonté. Plus généralement, elle est sans rapport avec l’objectivation de la volonté car elle ne s’exprime ni par des concepts ni par des idées, mais directement, de façon autonome avec un langage qui lui est propre et qui est universel. Elle n’imite pas le monde, pas plus qu’elle ne le représente. Schopenhauer écrit : « Nous ne pouvons plus y trouver la copie, la reproduction de l’Idée de l’être tel qu’il se manifeste dans le monde »42.

22Si la musique occupe une place à part, c’est qu’elle permet un autre type de connaissance. L’idée qui préside à la réflexion du livre III consacrée au « Monde comme représentation », le livre que clôt le chapitre sur la musique, est intiment liée à la « pensée unique » du Monde comme volonté et comme représentation, et concerne les modalités de connaissance de la volonté. Rappelons que la volonté est postulée par Schopenhauer comme essence du monde et origine de toutes les manifestations physiques et physiologiques. C’est là que résident les germes utopiques de la conception de la musique chez Schopenhauer. Le philosophe ne précise pas si la musique est un lieu. Mais il la présente toujours à la fois comme un langage supérieur, donnant accès directement à la connaissance pure, et aussi comme un principe dépassant le monde physique. La musique échappe au monde phénoménal et permet à ceux qui l’entendent de toucher aux mystères de la volonté et du monde « du dehors », un peu comme le point d’Archimède qui, situé hors du monde, permettrait de soulever celui-ci. Mais pour Schopenhauer l’enjeu est autre, il n’est pas question de soulever le monde, mais d’en appréhender intuitivement l’âme afin d’échapper à la tyrannie de la volonté.

23L’originalité de la pensée schopenhauerienne réside, en partie, dans le fait que le philosophe déconnecte la musique de toute référence à la pratique ou à l’histoire de la musique. À rebours des romantiques qui s’efforçaient d’établir des périodisations plus ou moins strictes et, à la différence des positions que défendra plus tard aussi Hegel dans ses lettres ou dans ses cours sur l’Esthétique,43 Schopenhauer ne pose pas la question de l’histoire de la musique, concrète ou mythisée, mais pense la musique comme un monde en soi, anhistorique :

"[La musique est] complètement indépendante du monde phénoménal : elle l’ignore absolument et pourrait en quelque sorte continuer à exister alors que l’univers n’existerait pas"44.

24Il évoque ici non seulement la supériorité de la sphère musicale qui pourrait se passer de l’existence phénoménale de notre monde, mais postule, en outre, une musique autonome qui existe indépendamment de l'expérience qui en est faite. Tandis que la volonté a besoin de s’incarner dans les volontés individuelles et, plus généralement, dans le monde phénoménal, la musique est indépendante de la matière. Il n'y a donc pas musique parce qu’il y a des voix, des instruments, un répertoire et même des compositeurs. La musique existe pour elle-même, elle est non pas une musique des sphères, puisque la musique existerait sans l’univers, mais une sphère-musique.

25Cette conception u-topique à proprement parler, qui postule la musique comme un langage, voire une sphère hors du monde, mais sans ancrage spatial défini, semble entrer en contradiction avec l’idée préalablement évoquée selon laquelle la musique, mieux que tous les autres arts, donne une connaissance intuitive de la volonté et des phénomènes du monde. Mais cette apparente contradiction disparaît si l’on sait que l’impression que l’on a en entendant de la musique, à savoir que la musique parle de nos sentiments, provient pour le philosophe non pas d’une ressemblance effective entre la musique et le monde mais d’une analogie dont il nous est dit d’emblée qu’elle est impossible à prouver. Dans le livre III du Monde comme volonté et comme représentation comme dans les Suppléments où le rapport entre harmonie, mélodie et monde est repris et précisé, Schopenhauer postule qu’il existe une analogie entre la nature de l’univers et l’harmonie, et une autre entre les caractères de la volonté humaine et la mélodie.

26Si la musique est supérieure aux autres arts, c’est que sa structure sonore, l’harmonie, qui est envisagée ici de façon anhistorique, équivaut à l’ensemble des idées. L’harmonie offre à elle seule une image complète de la volonté. On sait que Schopenhauer tisse notamment un lien entre les quatre voix de toute harmonie et les quatre degrés de l’échelle des êtres. Ainsi la basse, le ténor, l’alto et le soprano correspondent-ils respectivement au règne minéral, au règne végétal, au règne animal et à l’homme.45

27La mélodie, quant à elle, est définie comme l’image secrète de la volonté : avec ses propres moyens, elle va exprimer les « émotions de la volonté même »46. La volonté s’incarne dans des individus dénombrables, et la musique, via la mélodie, s’incarne dans différentes mélodies. Mais la mélodie n’exprime pas le sentiment individuel ; elle « n’exprime jamais le phénomène, mais l’essence intime, le dedans du phénomène, de la volonté même »47. Le philosophe ajoute, dans une affinité avec les positions de Friedrich Schlegel ou encore de Tieck et de Wackenroder, que la musique peint tous ces sentiments « pour ainsi dire abstraitement »48. Il y a dans Le Monde comme volonté et comme représentation un effacement manifeste de la dimension impressionnelle de la signification musicale au profit des rapports harmoniques.49 Ce sont les rapports numériques entre les sons qui, pour Schopenhauer, confèrent à la musique sa capacité à « reproduire les modifications de la volonté »50 tout en lui garantissant son autonomie. À la suite de Novalis, de F. Schlegel et de Tieck ou encore de Hoffmann, Schopenhauer affirme que c’est le langage abstrait des sons qui émancipe la musique de la contingence du monde, plus précisément de celle qui emprisonne les mots. Cette affirmation du primat du langage instrumental débouche sur une véritable « métaphysique de la musique instrumentale », c’est d’ailleurs ainsi que le philosophe nomme la partie des Suppléments au Monde consacrée à la musique, dans laquelle sa pensée rappelle en plusieurs points la position soutenue par Hoffmann dans les articles sur Beethoven. Tandis que le philosophe vante la forme symphonie comme la forme supérieure de la musique qui permet de pénétrer l’insondable et de jeter de la clarté dans l’obscur, il rejette la musique à programme qui subordonne l’œuvre à des préoccupations phénoménales.51

28Ainsi la symphonie apparaît-elle comme la forme musicale existante la plus pure, car étant sans mots, elle est sans matière et donc sans limite. La critique s’est souvent arrêtée au paragraphe dans lequel Schopenhauer vante la musique des opéras de Rossini qu’il juge puissante au point de faire oublier les faiblesses du livret. Mais c’est oublier que, dans les Suppléments, il dresse Beethoven en exemple et déclare voir dans les symphonies de celui-ci « la voix de toutes les passions »52 ; les partitions des symphonies expriment certes des sentiments mais « sans la substance, comme un monde de purs esprits sans la matière »53. Immatériel, le langage des sons est aussi qualifié d’ « âme sans corps ».

29La musique est un langage créateur, qui permet à celui qui la reçoit d’apercevoir les plis secrets de la volonté, de comprendre l’âme du monde phénoménal, l’âme des sentiments humains. L’emploi du terme « âme », prend une connotation toute particulière chez le néoplatonicien qu’est Schopenhauer. Dans le Timée, Platon fait consister l'âme du monde en une substance intermédiaire entre le Dieu suprême et l'univers.54 Dans Le Monde, Schopenhauer décrit la musique en des termes qui, parfois, rappelle la définition platonicienne évoquée : la sphère-musique n’a pas besoin de s’incarner dans le monde, elle pourrait apparaître davantage comme un principe intermédiaire entre la volonté et le monde. Mais chez le philosophe allemand, la musique n’apparaît pas toujours comme un simple intermédiaire, elle est un principe postulé à certains paragraphes du Monde comme pouvant se substituer non seulement au monde, mais aussi à la volonté. Cette idée est reprise dans l’idée que le monde aurait pu être une incarnation de la musique autant qu’une incarnation de la volonté. On voit bien là qu’il y a une forme de coïncidence non pas entre le monde et la musique mais entre la volonté, origine de toute manifestation, et la musique, qui exprime l’âme des phénomènes :

"En conséquence, le monde aurait pu être appelé une incarnation de la musique tout aussi bien qu’une incarnation de la volonté"55.

30Dire que le monde aurait pu être appelé une incarnation de la musique, sous-entend que la musique est une autre volonté et non pas un autre monde, une sphère qui se situe au même niveau que la volonté, au niveau de l’origine des phénomènes. Pour raisonner en termes kantiens, si la volonté schopenhauerienne est assimilable à la chose en soi, la musique, âme sans corps, est également de l’ordre du noumène. On pourrait dire que les phénomènes terrestres pourraient en être appelés l’incarnation, mais l’incarnation non nécessaire. La musique correspond alors bien à cette âme du monde qui est une autre volonté, qui pourrait même se substituer à la volonté.56

31Le monde aurait pu être, mais il n’est pas une incarnation de la musique, il est une incarnation de la volonté. En revanche, quand nous entendons de la musique, une âme extérieure nous habite, nous libère des principes de la volonté, et nous permet de toucher à autre chose. Le sentiment de douleur ou de peine n’est alors plus l’expression de la tyrannie de la volonté mais l’expression d’un sentiment musical abstrait. Alors, le temps de l’écoute, peut surgir un monde comme musique et comme intuition et non un monde comme volonté et comme représentation. L’écoute par exemple d’une symphonie de Beethoven permet de percer les secrets de la volonté, de donner une image complète et fidèle de la nature du monde qui roule dans un chaos immense de formes sans ordre mais soudain, le combat le plus violent, se résout l’instant d’après « en la plus belle des harmonies »57.

32Si l’âme dans la tradition platonicienne préexiste à toute chose, la musique elle aussi existe a priori, avant les choses, donc indépendamment du phénomène. Schopenhauer affirme que la musique nous donne ce qui précède toute forme. Elle possède une antériorité par rapport au monde des phénomènes. Elle est, autrement dit, connaissance pure et intuitive. Si le concept offre une connaissance « post rem », a posteriori, si la réalité nous fournit des « universalia post rem », la musique, elle, nous transmet des « universalia ante rem », donc une connaissance a priori. Elle peut certes exprimer l’âme du monde phénoménal, mais elle est indépendante et n’a pas besoin de l’expérience.58 En cela, elle est sur un pied d’égalité avec la volonté. Et il y a bien une coïncidence entre volonté et musique. Celle-ci apparaît comme un « œil » qui est ailleurs et perce à jour « l’histoire secrète de la volonté »59 et dévoile les plis des sentiments humains, elle rend clair l’obscur, et conscient l’inconscient. Elle est conscience inconsciente, pure intuition, connaissance pure.

33Le geste utopique que Schopenhauer associe à la musique rompt avec le schéma ternaire romantique, hérité de l'histoire chrétienne du salut. La musique ne donne pas accès à un royaume idéal hors du monde, ni ne permet d'instaurer sur terre une paix éternelle. Elle est certes un langage merveilleux, un logos supérieur à tous les autres arts, qui apporte un savoir intuitif, mais seule la philosophie peut tenter d'inscrire dans la durée cette échappée à la tyrannie de la volonté qui règne sur terre. Toutefois, s'il y a bien évocation d'une possible utopie musicale qui s’inscrirait dans la durée, celle-ci est formulée à l'irréel du passé : la musique aurait pu se substituer à la volonté, et donc s'incarner dans le monde, alors le monde aurait pu être un « monde musique », ignorant le dictat de la volonté car permettant la connaissance de celle-ci. C'est cette (im)possible connaissance qui confère à la musique-logos sa dimension utopique, pensée chez Schopenhauer en dehors de tout messianisme. Si la musique renvoie à l'origine des temps, à un avant le monde des phénomènes, il n'existe pas de pensée d'un avenir meilleur, juste quelques instants épiphaniques où le monde se révèle à nous, devient transparent, nous fait entrevoir, le temps de l'écoute, l’essence du monde et l'harmonie derrière le chaos pour nous délivrer en musique.

Notes   

1  L’’Esprit de l’utopie (Geist der Utopie), trad. Anne-Marie Lang et Catherine Piron Audard, Paris, Gallimard, 1977, p. 182-192. Voir notamment Józef Kosian, « Schopenhauer bei Ernst Bloch », in Schopenhauer im Kontext. Deutsch-polnisches Schopenhauer-Symposium 2000, hrsg. von Dieter Birnbacher; Leon Miodonski & Andreas Lorenz, Würzburg, Königshausen & Neumann, 2002, p. 215-222 ; Wolfgang Schirmacher, « Schopenhauer bei neuren Philosophen », in Schopenhauer-Jahrbuch, 64, 1983.

2  Arthur Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, trad. A. Burdeau, 2e éd., Paris, PUF, 2009.

3  Dans la critique française, cet apport n’est que peu valorisé : c’est l’influence, même mince, des esthétiques kantiennes et schillériennes sur l’esthétique schopenhauerienne (notamment Clément Rosset, Ėcrits sur Schopenhauer, Paris, PUF, 2001, p. 156-158) qui est mise en avant. On trouve par ailleurs mention de l’influence de l’esthétique de Schelling sur celle de Schopenhauer : Alexis Philonenko, Schopenhauer. Une Philosophie de la tragédie, Paris, Vrin, 1999, p. 174-176 ; Vincent Stanek, La Métaphysique de Schopenhauer, Paris, Vrin, 2010, p. 178.

4  Wilhelm Heinrich Wackenroder & Ludwig Tieck, Ėpanchements d’un moine ami des arts, suivi de Fantaisies sur l’art, trad. Charles Le Blanc et Olivier Schefer, Paris, José Corti, 2009.

5  E.T.A. Hoffmann, « Recension./Sinfonie pour 2 Violons, 2 Violes, Violoncelle et Contre-Violon, 2 Flûtes, petite Flûte, 2 Hautbois, 2 Clarinettes, 2 Bassons, Contrebasson, 2 Cors, 2 Trompettes, Timbales et 5 Trompes, composée et dédiée etc. par Louis van Beethoven (…), Œuvre 67. No. 5. des Sinfonies », in Allgemeine musikalische Zeitung, 1810, n° 40, p. 630-642 ; et AMZ, 1810, n° 41, p. 652-659. Abrégé par la suite en «Beethoven-Aufsatz ».

6  Voir notamment Ernst Behler, « Le premier romantisme : crise des Lumières », Revue germanique internationale, n°3, 1995, p. 11-29, mis en ligne juillet 2011 : URL : http://rgi.revues.org/479. Plus généralement : Michael Löwy/Robert Sayre, Révolte et mélancolie. Le romantisme à contre-courant de la modernité, Paris, Payot, 1992.

7  Voir notamment Carl Dahlhaus, Die Idee der absoluten Musik, Kassel, Bärenreiter, 1978, p. 62-81 ; 91-105.

8  « Ein Fragment muß gleich einem kleinen Kunstwerke von der umgebenden Welt ganz abgesondert und in sich selbst vollendet sein wie ein Igel. » (Athenäum-Fragmente), Friedrich Schlegel, Schriften zur Literatur, München, Carl Hanser Verlag, 1972, p. 45.

9   Voir Mirko M. Hall, «Friedrich Schlegel's Romanticization of Music», in Eighteenth-Century Studies, vol.  42, Number 3, 2009, p. 413-429 et Carl Dahlhaus, Die Idee der absoluten Musik, op. cit., p. 76. Voir aussi chez E.T.A. Hoffmann, « Beethoven-Aufsatz », op. cit. ici, p. 631.

10  Fragmente und Studien 1799-1800, in: Novalis Werke, hrsg. und kommentiert von Gerhard Schulz, München, Beck, 1981, p. 524.

11  Fantaisies sur l’art, op. cit., p. 213 (traduction modifiée).

12  Voir notamment « Romantisme et musique instrumentale », in Jean-François Candoni, Penser la musique au siècle du romantisme. Discours esthétiques dans l’Allemagne et l’Autriche du XIXe siècle, Paris, PUPS, 2012, p. 32-42.

13  Voir Carl Dahlhaus, Die Idee der absoluten Musik, op. cit., p. 83.  

14  Fantaisies sur l’art, op. cit., p. 227.

15  August Wilhelm Schlegel, Schriften, Bd. 2. Die Kunstlehre, hrsg. Edgar Lohner, Stuttgart, 1963, p. 215. Traduction L.G.

16  C’est à Macbeth (1787) de Johann Friedrich Reichardt qu’il est ici fait allusion.

17  Fantaisies sur l’art, op. cit., p. 260-261.

18  E.T.A. Hoffmann, « Beethoven-Aufsatz », op. cit., p. 631.

19  Voir « Kirchenmusik und Oper in der Ästhetik E.T.A. Hoffmanns », in Carl Dahlhaus, Klassische und romantische Musikästhetik, Laaber, Laaber-Verlag, p. 111-121.

20  E.T.A. Hoffmann, « Beethoven-Aufsatz », p. 631.

21  Ibid.

22  Sur cette différence essentielle entre idéalisme spéculatif et art romantique, voir Manfred Frank, Einführung in die frühromantische Ästhetik, Frankfurt am Main, Suhrkamp, p. 222-223.

23  « Vergleichung des ästhetischen Werts der schönen Künste untereinander » (§ 53), in Immanuel Kant, Werke in zwölf Bänden, Bd. X, Kritik der Urteilskraft, hrsg. von Wilhelm Weischedel, Frankfurt a. M., Suhrkamp, 1974, p. 265-270.

24  « Von der Verbindung der schönen Künste in einem und demselben Produkte » (§ 52), in ibid, p. 264-265. Sur l’esthétique kantienne de la musique, voir Carl Dahlhaus, « Zu Kants Musikästhetik », in Klassische und romantische Musikästhetik, Laaber, Laaber-Verlag, 1988, p. 49-55.

25  Ibid, p. 269.

26  Fantaisies sur l’art, op. cit., p. 205-209.

27  Ibid., p. 209.

28  Ibid., p. 210.

29  Les chapitres sur la musique constituent la deuxième moitié des Fantaisies qui se referment sur une allégorie dans un ultime chapitre intitulé : « Rêve » : Ibid., p. 263-268.

30  Ibid., p. 232-233.

31  Ibid., p. 212.

32  E.T.A. Hoffmann, « Beethoven-Aufsatz », op. cit., p. 631.

33  Bernd Auerochs, Die Entstehung der Kunstreligion, Vandenhoeck und Ruprecht, 2009, p.. 14-18; Heinrich Detering, « Kunstreligion und Künstlerkult. Anmerkungen zu einem Konflikt von Schleiermacher bis zur Moderne », in: Schleiermacher-Tag. Eine Vorlesungsreihe, hrsg. von Günter Meckenstock, Göttingen, 2006, p. 179-200.

34  Sur l’esthétique musicale de Schelling, voir : Friedrich Wilhelm Joseph von Schelling, Sur la musique, introduction et notes par Danielle Cohen-Lévinas, traduction de Marc de Launay, Paris, Hermann, 2012.

35  Voir « Zu Schellings Theorie des musikalischen Rhythmus », in Carl Dahlhaus, Klassische und romantische Musikästhetik, op. cit., p. 248-256.

36  Fantaisies, op. cit., p. 214, traduction modifiée.

37  Fantaisies, op. cit., p. 247.

38  A. Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, op. cit. p. 1189.

39  Ibid., p. 328.

40  Ibid., p. 234.

41  « Chapitre XXXIX. De la métaphysique de la musique », in ibid., p. 1188-1200.

42  Ibid., p.224.

43  Voir Alain Patrick Olivier, Hegel et la Musique : de l’expérience esthétique à la spéculation philosophique, Paris, Honoré Champion, 2003.

44  A. Schopenhauer, Le Monde, op. cit.,  p. 329.

45  Ibid., p. 1188.

46  Ibid., p. 1190.

47  Ibid., p. 334.

48  Ibid.

49  Sur ce point, voir Vincent Stanek, La Métaphysique de Schopenhauer, Paris, Vrin, 2010, p. 204.

50  A. Schopenhauer, Le Monde, op. cit., p. 204.

51  Ibid., p. 1190.

52  Ibid.¸p. 1190.

53  Ibid., p. 1191.

54  Voir notamment Joseph Moreau, L’Âme du monde de Platon aux Stoïciens, Paris, Belles Lettres, 1965.

55   A. Schopenhauer, Le Monde, op. cit., p. 336.

56  Schopenhauer réaffirme à plusieurs reprises que « la volonté seule existe. Elle est la chose en soi, elle est la source de tous les phénomènes » (Le Monde, op. cit., p. 238).

57  Ibid., p. 1190.

58  Sur ce problème de l’antériorité, voir Clément Rosset, Ecrits sur Schopenhauer, op. cit., p. 231-240.

59  A. Schopenhauer, Le Monde, op. cit., p. 1193.

Citation   

Laure Gauthier, «Généalogie d’une pensée de l’utopie musicale autour de 1800. Aux origines de l’esthétique musicale d’Arthur Schopenhauer », Filigrane. Musique, esthétique, sciences, société. [En ligne], Numéros de la revue, Musique et Utopie, mis à  jour le : 27/02/2014, URL : https://revues.mshparisnord.fr:443/filigrane/index.php?id=627.

Auteur   

Laure Gauthier