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Du sens, ou rien…

Christian Hauer
juin 2011

DOI : https://dx.doi.org/10.56698/filigrane.76

Résumés   

Résumé

L’art est sens, ou n’est pas. Car sa fonction est de permettre à l’homme de se changer et de changer le monde ou du moins son rapport au monde. Cet article s’interroge ainsi sur l’émergence du sens dans la rencontre avec l’art, mais à la lumière d’une condition qui seule permet d’en recevoir quelque chose de nouveau et de singulier : comprendre le dire de l’œuvre d’art avant de le couvrir par notre propre dire. D’où la nécessité de considérer le sens originel d’une œuvre, qui correspond notamment à la manière dont elle prend position à un moment de l’histoire : entrer en dialogue avec une œuvre ne peut se faire qu’en entrant aussi dans le dialogue dont elle est la réponse, sous peine de ne se livrer qu’à un monologue esthétique réduisant l’œuvre elle-même au silence.

Abstract

Art is meaning, or is not. Because its function is to allow humankind to change and change the world, or at least their relationship with the world. This article deals with the rise of meaning before art, but in the light of the only condition which allows to perceive something new and singular: understanding the discourse of the work before covering it with one’s own discourse. Hence the necessity to consider the original meaning of a work, which corresponds especially to its place at a particular time in history. Starting a dialogue with a work of art can only be achieved by taking part in the dialogue to which it is an answer. Otherwise, there would be a mere aesthetic monologue, which would silence the work itself.

Index   

Texte intégral   

1Pourquoi n’y a-t-il pas rien ? – Au fondement même de la métaphysique, cette question se pose tout autant pour l’art1. Vaste question, certes, dont voici une version plus répandue : pourquoi ce que l’on appelle l’art existe-t-il ? Parce que quelqu’un, à un moment et en un lieu donnés, a ressenti le besoin de créer du sens. Plus précisément : de former du sens. Et n’aurait-on pas tendance à l’oublier parfois (si ce n’est souvent) ? En effet, faire de l’art, créer, ce n’est pas simplement produire un objet. Il est vrai que considérer l’art de cette manière facilite les choses : un objet, c’est reproductible en série et surtout à l’identique, chaque reproduction pouvant être prise comme modèle ; l’objet a une fonction précise, on l’utilise, on le consomme, on le jette. Le sens d’un objet, c’est celui qui lui est assigné en l’utilisant de telle ou telle manière. Mais de ce point de vue l’œuvre d’art véritable n’est pas un objet. Car elle est unique, et même si elle est reproductible, la fonction fondatrice du texte premier (ou de ce qui est considéré comme tel) ne saurait être remise en cause : exécuter une œuvre musicale, c’est interpréter, donc proposer une version d’un texte premier virtuel mais unique et incontournable, les diverses interprétations d’une même œuvre permettant d’affiner et d’enrichir de multiples résonances ce texte virtuel de référence, sorte de substance-aura indistincte, n’ayant pas d’existence propre, à laquelle, à chaque exécution, à chaque écoute, il faut donner forme, et forme toujours singulière. Et surtout, l’œuvre d’art est exigeante. On ne peut pas en faire n’importe quoi. Sinon les sens possibles prolifèrent, jusqu’à trahir l’œuvre, et à faire, au mieux, œuvre nouvelle. Utiliser une chaise comme fourchette, ce n’est pas trahir la chaise, c’est surtout se compliquer la vie. Interpréter une œuvre de Boulez avec des instruments et des techniques baroques (basse continue comprise), c’est aussi se compliquer la vie, mais c’est surtout trahir tout à la fois l’œuvre, l’histoire et les intentions du créateur. Ce qui du reste ne nous éclaire que bien peu sur le sens. De ce besoin ressenti par quelqu’un de créer une œuvre. De l’œuvre comme moment de vie, voire moment pour vivre. De l’œuvre comme possibilité de rencontre, d’échange, donc d’enrichissement, ou, pour reprendre les termes de Hans-Georg Gadamer, d’« accroissement d’être », y compris pour son créateur dans le cours même de son travail de création…

2Pourquoi n’y a-t-il pas rien ? – Ou : pourquoi existe-t-il des œuvres d’art, donc du sens créé et proposé au monde, puis goûté, nourri, développé par des générations successives ? Cette question est d’autant plus pertinente que l’expérience artistique, fondamentalement libre, à laquelle personne ne peut être contraint par autrui, peut ne pas être2. Voici une, sinon la réponse : car vivre, c’est sans cesse créer du sens, s’écrire et se réécrire, inventer et réinventer le monde ou du moins notre rapport au monde. Dans cette quête vitale, permanente et universelle du sens, l’art n’est qu’un cas particulier, mais privilégié : selon George Steiner, au même titre que certains modes d’expérience religieuse et métaphysique, la rencontre avec l’art constitue pour les hommes « l’injonction la plus pénétrante à la transformation »3. De fait, l’art (en tout cas ce que l’on appelle « art » aujourd’hui) s’est toujours imposé à l’homme pour remplir cette fonction : lui permettre de créer, de vivre du sens pour se changer et changer le monde. L’art sert, pour reprendre le terme de Paul Ricœur, à se comprendre mieux, autrement, voire enfin. Ce qui concerne ceux qui reçoivent l’art tout autant que ceux qui le créent. Car curieusement on oublie souvent les créateurs. Sous prétexte que le créateur et son art ne sont en aucune manière liés l’un à l’autre : l’œuvre est à prendre comme elle est maintenant et non comme elle a été et pour ce qu’elle a signifié pour son créateur et même son époque. Comme si pour comprendre une œuvre l’on n’était pas amené à s’intéresser, souvent sans même s’en rendre compte (ou se l’avouer), à l’auteur, sa personnalité, ses intentions (même supposées). Aurait-on seulement l’idée de tenter de comprendre un crime (qui est aussi un acte sensé) sans s’attacher aux mobiles (les intentions) du criminel, sans reconstituer le lieu, l’heure et les circonstances précises (l’histoire) de ce crime, sans recourir à l’autopsie (l’analyse) de la victime ? Ne dit-on pas, d’ailleurs, que le crime parfait, qui donc ne peut être élucidé, est celui où le mobile n’apparaît pas ? Un peu le rêve de Duchamp, finalement, mais qui n’a pas complètement abouti… Mais ne poussons pas plus loin cette comparaison. Ce problème sera repris plus loin : quoi qu’on fasse et pense, l’œuvre d’art n’est pas orpheline et ne se laisse comprendre qu’à la condition de la rapporter à ses origines

3Voyons d’abord comment une œuvre d’art peut faire sens pour quelqu’un. Une telle réflexion s’impose à une époque où parler du sens (ou de ce qui tient lieu de sens) est devenu monnaie courante : dans les médias, on ne parle plus que la main sur le cœur ; la parole est plus que jamais donnée aux anonymes et à leurs émotions, souvent exacerbées sinon provoquées par la présence des caméras et des micros. Mais dans le discours musicologique le sens ne fait guère recette. L’herméneutique fait exception, si l’on admet que tout discours sur le sens relève de l’herméneutique, et la sémiotique s’intéresse moins au sens qu’à la manière dont les signes fonctionnent et peuvent donc accéder au sens. Il ne sera ici question ni de l’une ni de l’autre, mais de la rencontre avec le sens et des préalables qui rendent celle-ci possible. Certes, le sens relève de l’indicible. En musique comme ailleurs. Y compris dans le langage verbal : il est bien possible que nous l’ayons forgé moins pour nommer des objets et des choses présents matériellement que pour tenter de dire l’indicible, donc ce qui n’est pas là, et surtout jamais là. Dire l’indicible : au même titre donc que la peinture, la musique et toutes les formes d’art. Mais en même temps le langage verbal détient ce privilège d’être doté d’un grand pouvoir de communication. De ce fait, même pour apprendre et analyser la musique, par exemple, les mots sont indispensables. Peut-on imaginer un chef d’orchestre diriger une répétition sans s’adresser à ses musiciens ? Il faut pouvoir transmettre un minimum d’informations. Mais, encore une fois, réduire le langage des mots (sans même parler de la littérature) à un pouvoir informatif est oublier l’essentiel, voire la raison d’être de ce langage : donner forme à du sens, à quelque chose qui ne peut être complètement dit. Comme pour la musique, par exemple, où c’est par le discours que « d’une autre façon, la musique se montre, se donne, se redonne » et que l’expérience musicale « prend cohérence et consistance », et même si « tout discours est une atteinte à la singularité d’une expérience, [mais] sans lui cette expérience s’évanouirait dans le flux d’une impression »4. De même pour toute expérience profonde du sens. Toute l’entreprise de Proust vise ainsi à donner forme littéraire (donc « cohérence et consistance ») à une expérience particulière du temps qui avait justement pour fâcheuse habitude de s’évanouir « dans le flux d’une impression » au fur et à mesure que le narrateur tentait de l’analyser…

4Mais goûter du sens exige que soient remplies un certain nombre de conditions. Si c’est le cas, un sens peut être goûté, donc être fait sien par le récepteur, lui ouvrant ainsi la voie au se-comprendre mieux ou autrement. On n’évoquera ici que deux conditions, à la fois générales et non exclusives : l’une est un préalable obligé, mais ne préjugeant en rien de la manière dont un sens peut être goûté, contrairement à l’autre, laquelle présente le sens goûté comme un sens plausible. Goûter un sens suppose tout d’abord qu’il y ait eu au préalable, de manière plus ou moins consciente, manque, attente, interrogation, et finalement rencontre… Goûter une œuvre, se l’approprier, c’est s’ouvrir à elle et même se « désapproprier » de soi-même, condition impérative pour recevoir quelque chose d’elle, en être transformé : « non point imposer au texte sa propre capacité finie de comprendre, dit Ricœur, mais s’exposer au texte et recevoir de lui un soi plus vaste »5. De fait, « la chose du texte » (les « propositions de sens déployées par le texte ») « ne devient mon propre que si je me désapproprie de moi-même pour laisser être la chose, le “monde” du texte : alors, j’échange le moi, maître de lui-même, contre le soi, disciple du texte » (p. 54). Et cette « appropriation » d’« autre chose que soi » ne peut se réaliser que parce que l’expérience artistique rend possible un autre rapport au réel, à plus forte raison en musique. En effet, en plus d’une suspension, d’une abolition de la fonction référentielle de premier degré, qui correspond au discours ordinaire, au monde de la réalité quotidienne, des objets manipulables, s’opère la libération d’une référence de second degré qui atteint le monde du récepteur au niveau de son être-au-monde (cf. p. 52, 114). Dès lors, un autre rapport au réel – et à soi-même – est possible : « de nouvelles possibilités d’être-au-monde sont ouvertes dans la réalité quotidienne ; fiction et poésie [et bien sûr musique] visent l’être, non plus sous la modalité de l’être-donné, mais sous la modalité du pouvoir-être » (p. 115). Autrement dit, « les énoncés métaphoriques et narratifs […] visent à re-figurer le réel, au double-sens de découvrir des dimensions dissimulées de l’expérience humaine et de transformer notre vision du monde », ce qui est « fort éloigné de la conception linéaire d’une référence inédite spontanément opérée par des énoncés eux-mêmes inédits » : la refiguration constitue plutôt « une active réorganisation de notre être-au-monde, conduite par le lecteur, lui-même invité par le texte, selon le mot de Proust […], à devenir lecteur de lui-même »6.

5Accepter de se désapproprier d’une partie de soi-même, s’ouvrir à l’œuvre, aller à sa rencontre : telle est donc la première condition pour qu’un sens puisse être goûté. Et pour revenir peut-être chez soi un peu autre (pas toujours mieux, ni meilleur…). Mais il ne faut pas s’y méprendre : un sens, ce n’est pas le sens. Mais si l’article est indéfini, il n’en est pas pour autant indéterminé, ou aléatoire. Dire ainsi : le sens, c’est s’en tenir au sens comme message, et déchiffrer une œuvre ne serait alors que se mettre en quête d’un sens unique inscrit dans l’œuvre de manière délibérée par l’auteur : l’œuvre comme sanctuaire d’une vérité cachée. Mais trois raisons au moins s’opposent à une conception aussi réductrice de l’œuvre d’art. Tout d’abord, le sens n’est toujours que possible : l’œuvre ne fait et même ne peut que proposer « un éventail de possibilités existentielles », une « expérience virtuelle de l’être-au-monde »7, dans laquelle le récepteur accepte (ou non) de s’engager. Ensuite, et même si celui-ci se met effectivement « en route vers l’orient du texte »8, le sens toujours se dérobe au fur et à mesure que nous cherchons à le saisir, non plus virtuel, alors, mais à la fois se réalisant et pourtant insaisissable. Enfin, une « “même toile” [ou œuvre d’art en général] comporte plusieurs traits, ou faisceaux de traits, qui peuvent conduire à plusieurs assignations, et donc à plusieurs interprétations non pas incertaines, mais également plausibles, fondées sur des “perceptions” également correctes, quoique sans doute incompatibles dans l’instant […] »9. De ces remarques il ressort qu’il n’y a guère de message possible, du moins clairement identifiable comme tel et qui pourrait par conséquent être formulé et définitivement fixé avec des mots. Pourtant, et c’est l’un des grands mystères de l’œuvre d’art (et seulement de l’œuvre d’art ?), si plusieurs sens sont possibles, ils se doivent d’être « plausibles ». De fait, le sens est ouvert et fermé à la fois. Ce qui mène à l’autre condition, justement : le sens, malgré toutes ses ambiguïtés et fluctuations, n’est pas arbitraire…

6En effet, dans la chaîne du sens, l’œuvre d’art est première, puisqu’elle aurait pu ne pas être là. Et en raison même de sa contingence, l’œuvre ne peut qu’appeler cette question : quelle force l’a donc amenée là ? Ce qui suit – les réceptions successives – ne vient finalement que pour tenter de répondre à cette question, ou tout simplement, et trop souvent, pour consommer. Qui ne connaît cette terrible expression : « J’ai fait ceci ou cela », par exemple la Sixtine, ou tel grand musée ? On passera sur le caractère impropre du verbe « faire » (c’est le créateur qui fait, et personne d’autre, tous les faire ultérieurs se présentant avant tout, dans le meilleur des cas, comme des tentatives de re-faire), qui dans une telle expression signifie que l’on fait parce qu’il faut bien en passer par là, comme de faire les courses ou les poubelles. Car on s’occupe souvent d’art comme on va faire son marché, on prend à droite, à gauche, en fonction du prix ou de la fraîcheur supposée des produits. Mais l’œuvre d’art n’est pas une botte de poireaux que l’on trouvera plus ou moins bons ou parfumés. Ne faudrait-il pas bien plus s’ouvrir à sa présence, et à cette fin essayer de la comprendre, c’est-à-dire essayer de saisir ce qu’elle a à dire, ou du moins ce qu’elle veut dire, bref, l’écouter, la déchiffrer ? Pour ne pas, d’emblée, la couvrir par nos si bruyantes intentions et attentes, donc par notre propre dire, avant de lui avoir rendu justice, avant d’avoir fait l’effort d’entendre et si possible de comprendre son dire à elle. Car l’œuvre d’art dit quelque chose, et trop souvent on la réduit au silence avant même de l’avoir écoutée. Alors que se trouver en présence d’une œuvre d’art est de l’ordre de la rencontre. Ainsi, pour George Steiner, « le sens, les modes d’existence de l’art, de la musique et de la littérature relèvent de l’expérience de notre rencontre avec l’autre »10. Et cette rencontre, lorsqu’elle est pensée comme telle, et non pas comme un simple monologue adressé à l’œuvre ainsi rendue muette, ne va pas de soi : « Toute esthétique, tout discours critique et herméneutique est une tentative de clarifier le paradoxe et le côté obscur de cette rencontre, ainsi que ses félicités. L’idéal d’un écho total, d’une réception transparente, est très précisément l’idéal messianique. Car dans la générosité messianique, tout mouvement, tout marqueur sémantique deviendrait une vérité parfaitement intelligible ; […] » (p. 170-171).

7Pour George Steiner, rencontrer une œuvre d’art, c’est comme être confronté à l’arrivée d’un « inconnu », d’un « étranger ». Alors, « nous faisons usage des preuves qui l’entourent, de notre expérience (la culture), des instruments de discernement dont nous disposons, pour chercher à dégager les significations possibles de cette venue. Nous nous efforçons de comprendre, de rendre intelligibles ses gestes, son discours, et le message qu’ils nous adressent ». Et de préciser que « nous sommes pleinement conscients de ce que notre compréhension, même lorsqu’elle s’approfondit pour devenir intimité, tout particulièrement lorsqu’elle devient intimité, demeurera partielle, fragmentaire, sujette à l’erreur et au réexamen. Mais ce savoir ne nous conduit pas à supposer que la présence que nous avons devant nous n’est qu’un vide spectral, ou une illusion » (p. 212-213). On reviendra plus loin sur le processus de la réception : sur ce qui le rend possible, le conditionne. Mais on retiendra ici l’idée que cette rencontre suppose une écoute, un respect, une curiosité. Car l’étranger, ou l’œuvre, a peut-être quelque chose à nous dire, à nous apprendre, à nous faire ressentir. Quelque chose d’autre que ce que nous connaissions déjà. C’est en cela que l’œuvre d’art est à l’origine du sens, ou plutôt de sens qui sans elle n’aurait jamais pu exister. Voilà une évidence, rétorquera-t-on. Encore faut-il en tirer les conséquences. Et tout d’abord celle-là : « le poème, le tableau, la composition, constituent la raison d’être des interprétations et des jugements auxquels ils donnent lieu. Ils constituent en effet le “pré-texte” de toutes les “textualités”, “intertextualités” […] et “anti-textualités” subséquentes, mais certainement pas en un sens péjoratif, réducteur. Ils sont au contraire la source de leur être » (p. 184). Le geste créateur est premier, irréductible à tout autre ; il est source de tous les sens possibles de l’œuvre.

8Le discours sur l’œuvre n’en est pas pour autant rejeté et renié. George Steiner milite ainsi pour une herméneutique définie comme « la mise en pratique d’une compréhension responsable, d’une appréhension active » (p. 26). Mais est-ce suffisant ? – De fait, le discours sur l’œuvre peut remplir deux grandes fonctions au moins. Tout d’abord, nous l’avons vu, donner « cohérence et consistance » à l’expérience artistique. Et Michael Baxandall se montre plus précis encore11 : « C’est là la nature même de l’activité critique qui nous intéresse : le concept aiguise la perception de l’objet, qui lui-même aiguise le sens des mots » (p. 68). C’est ce qu’il appelle la fonction « ostensive » du langage critique, par lequel concepts et objets se renforcent mutuellement : « un concept nous permet de faire ressortir un aspect particulier d’un tableau, et en même temps il gagne en précision dans notre esprit quand nous nous reportons à ce que nous voyons de ce tableau. Ce processus est bénéfique pour nous : l’effort qu’il nous demande nous amène à regarder le tableau de plus près » (p. 190). Telle peut donc être une première fonction du discours sur l’œuvre d’art : par un jeu de va-et-vient permanent, à la fois affiner notre expérience de l’œuvre et le langage que nous utilisons pour en rendre compte. Ce qui ouvre sur une autre fonction possible du discours sur l’art, plus précisément d’une herméneutique, entendue en un sens large. Ainsi, pour Daniel Charles, l’herméneutique « vise à chaque fois un événement, ou mieux, un avènement », autrement dit « elle poursuit l’émergence ou la genèse d’une réalité ou œuvre particulière, en se situant dans son sillage, en prolongeant sa mouvance, bref en “puisant”, comme disait Heidegger, “à l’eau de la source” ; ou bien, pour emprunter le lexique de Varela ou Niklas Luhmann, en lui appliquant une clause d’autoréférentialité, c’est-à-dire sans jamais cesser de se référer à sa teneur propre »12.

9À mon sens, et je me démarque ainsi quelque peu de Daniel Charles, cette « teneur propre » est d’abord historique, et en cela même originelle. L’œuvre est marquée par le sceau de l’histoire. Elle prend position à un moment précis. Et pour ainsi dire définitivement. Car ce marquage historique conditionnera toujours notre rencontre avec l’œuvre. Ce qui explique pourquoi deux œuvres qui seraient rigoureusement identiques sur le plan syntaxique mais créées à des moments différents n’auraient pas le même sens. Car on ne les lirait pas de la même manière, mais en fonction de problématiques différentes et propres à chacune d’elles, dans la limite, certes, de nos connaissances. Pensons ici à la fameuse nouvelle de Jorge Luis Borges, Pierre Ménard, auteur du « Quichotte »13, qui relate (imagine) l’entreprise de Pierre Ménard, auteur nîmois du début du XXe siècle ayant entrepris de réécrire à l’identique des chapitres entiers du Don Quichotte de Cervantès. Et « comparer le Don Quichotte de Ménard à celui de Cervantès est une révélation. Celui-ci, par exemple, écrivit […] : “la vérité, dont la mère est l’histoire, émule du temps, dépôt des actions, témoin du passé, exemple et connaissance du présent, avertissement de l’avenir.” Rédigée au XVIIe siècle, rédigée par le “génie ignorant” Cervantès, cette énumération est un pur éloge rhétorique de l’histoire. Ménard écrit en revanche : “la vérité, dont la mère est l’histoire, émule du temps, dépôt des actions, témoin du passé, exemple et connaissance du présent, avertissement de l’avenir.” L’histoire, mère de la vérité ; l’idée est stupéfiante. Ménard, contemporain de William James, ne définit pas l’histoire comme une recherche de la réalité mais comme son origine. La vérité historique, pour lui, n’est pas ce qui s’est passé. Les termes de la fin – “exemple et connaissance du présent, avertissement de l’avenir” – sont effrontément pragmatiques » (p. 473).

10Gérard Genette souligne également cette historicité incontournable de l’œuvre d’art, et plus précisément de la « relation esthétique » elle-même14 : « les œuvres d’art, en tant qu’artefacts à fonction (intentionnellement) esthétique, posent de manière plus pressante, parce que plus pertinente, la question de leur appartenance générique et de leur provenance génétique – et en particulier historique, puisqu’un produit humain est toujours par définition un objet historique, dont l’intentionnalité est historiquement située et définie » (p. 226). Et ce caractère historique de la relation esthétique à une œuvre d’art ne se retrouve pas dans la relation esthétique à un objet naturel : certes, celle-ci est également « catégorisée par l’appartenance générique de cet objet (on apprécie d’ordinaire une tulipe comme tulipe et un papillon comme papillon, et non l’inverse), mais elle échappe par définition à ce type particulier de catégorisation qui dépend du caractère artefactuel et historique des œuvres, et donc de leur relation à d’autres œuvres du même auteur, du même genre, de la même époque, de la même culture, relation plus ou moins mais toujours pertinente en tant qu’elle suppose une communauté intentionnelle – individuelle ou collective, consciente ou inconsciente – dont elle est censée procéder » (p. 222). De fait, « l’histoire de l’art, au sens large, avec tout ce que cette notion implique ou symbolise, importe […] à mon appréciation d’une œuvre, pour peu que je la tienne pour, et la traite comme, une œuvre d’art » (p. 228). Et « Robert Klein a bien décrit “cette ‘historisation’ de la valeur incarnée dans l’œuvre”, cette “plongée de l’ex-valeur artistique absolue en ‘valeur de position’ historique, [qui met] la valeur exemplaire d’un artiste […] dans ce qu’on appelle son apport, et parfois simplement dans la ligne de son évolution, plutôt que dans la qualité esthétique de ses œuvres prises isolément, [et qui rend] difficile, sinon impossible, de juger une œuvre sans savoir ‘d’où elle vient’. Que serait l’œuf de Brancusi sans toute son histoire, et sans tout Brancusi ? […] Nous avons pris presque inconsciemment l’habitude d’historiser tout nouvel [et aussi bien tout ancien] objet et de toujours embrasser l’évolution d’un coup d’œil compréhensif, la jugeant selon sa richesse, son pouvoir de synthèse, sa qualité d’invention, l’importance des problèmes attaqués, la justesse et la hardiesse des solutions. Ce sont là indubitablement, dans un tel contexte, des critères esthétiques ; et des considérations purement historiques de date et de priorité deviennent du même coup artistiquement pertinentes […]” » (p. 229).

11Certes, l’œuvre d’art n’est pas qu’historicité. Mais elle est nécessairement cela aussi et même d’abord. Et en occultant ce marquage originel, on ne peut que se couper d’une réalité fondamentale de l’œuvre : de l’origine de son sens. Il est vrai que l’on peut s’en passer. Il n’empêche que ce processus d’historisation s’opère malgré tout et même malgré soi, et s’il le faut avec les moyens du bord. Ne rien connaître de ce marquage historique n’implique pas nécessairement ne pas comprendre une œuvre mais risque fort de nous faire passer à côté d’un sens « plausible », donc acceptable. Par conséquent, moins nous disposerons de connaissances, plus notre rencontre avec l’œuvre sera esthétique, c’est-à-dire, au sens étymologique du terme, de l’ordre du « sentir », et seulement de cet ordre. D’où une rencontre qui, de fait, n’est pas vraiment une rencontre, mais un simple face-à-face entre une œuvre condamnée au silence et un récepteur qui s’adresse à elle sans la considérer dans sa singularité mais seulement sous l’angle de sa singularité à lui. Le fruit de cette rencontre ne peut donc être qu’arbitraire et aléatoire car purement subjectif, puisque nourri par des connaissances et des problématiques toutes extérieures à l’œuvre considérée. Il s’agit évidemment d’un cas extrême : celui d’une rencontre avec une œuvre, et plus généralement avec un genre et un style dont on ne connaîtrait absolument rien. Bref, l’esthétique, oui, mais nourrie par des connaissances précises, d’ordre aussi bien historique que syntaxique, et qui sont à l’origine du sens. Car le danger qui guette, et aujourd’hui plus que jamais, est paradoxal : d’un côté l’historisme échevelé, qui culmine dans le culte bien connu de la commémoration, où le but est bien plus de mettre le passé à distance ou de le folkloriser que de le réactualiser ; de l’autre l’esthétisation poussée à l’extrême, où ce qui compte, c’est soi, son propre plaisir, et ainsi n’importe quelle œuvre d’art peut être goûtée sans connaissance préalable ; tout est mis sur le même plan, l’œuvre, réduite au silence, étant livrée pieds et mains liés au bon vouloir de ses consommateurs. Dans un cas comme dans l’autre, l’œuvre d’art dans sa singularité s’efface et sa force de transformation en est amputée d’autant : ce n’est pas l’œuvre qui propose à son récepteur un monde à habiter, pour reprendre les mots de Paul Ricœur, mais le contraire, l’œuvre qui est sommée de venir habiter le monde de son récepteur…

12Il est donc nécessaire d’établir un lien entre l’horizon originel, historique, et l’expérience esthétique. Jean Bollack, notamment, insiste sur la nécessité de comprendre le sens originel d’une œuvre avant de pouvoir entamer un dialogue avec elle15. Car ce sens existe, et il ne peut en être autrement. Toutefois, Jean Bollack « ne suppose pas un sens originel inscrit dans la langue qu’il va falloir extraire de sa gangue, mais qu’un sens a été construit à un moment donné de l’histoire dans une situation de dialogue, sinon de contestation avec la tradition » (p. 23). De fait, « aussitôt qu’on s’accroche au sens, on a affaire à une prise de position et à une fixation première, qui est toujours historique et se distingue des interprétations postérieures » (p. 45). Autrement dit, « la constellation originelle ne disparaît pas », car il existe « une relation entre le choix initial, qui s’est fait contre d’autres possibilités de sens, et les possibilités ultérieurement jouées contre lui » (p. 88). Par conséquent, on pourrait distinguer trois niveaux, qui d’ailleurs interfèrent les uns avec les autres : « il y a le dialogue déjà inscrit dans la formation originelle, puis celui, si l’on veut, que l’interprète entretient avec cette opération interne qu’il déchiffre (pour la comprendre), et enfin le dialogue que, plus près de Gadamer, il conduirait avec le résultat du déchiffrement, à savoir le contenu » (p. 90). Ce que propose ainsi Jean Bollack, c’est d’entrer d’abord dans le dialogue que l’œuvre entretient avec ce qui la précède et l’entoure afin de comprendre ce qu’elle a de singulier à dire, et finalement à nous dire : « ou bien le lecteur lit son “propre” livre, comme certains poètes recomposent un unique livre avec tout ce qui a été écrit, depuis toujours : dans ce cas le lecteur relie mais ne lit pas vraiment. Ou bien il essaie de comprendre celui d’un autre ; il est alors amené à se demander ce que le livre dit d’autre et de différent de ce que d’ordinaire l’on dit et de ce que soi-même on pense, et qu’il faudrait mettre entre parenthèses, si l’on veut que l’herméneutique critique aboutisse vraiment au dialogue qu’elle vise et si l’on veut éviter de faire dire » (p. 134).

13Il faut apporter ici deux précisions. D’une part, une telle démarche concerne aussi bien le chercheur que le simple amateur d’art, car pour entamer un dialogue, il faut comprendre ce que dit et en tout cas veut dire l’autre, sinon, à quoi bon ?… D’autre part, et contrairement à ce que l’on dit souvent, le problème est le même en musique que pour les autres formes d’art : l’œuvre musicale prend elle aussi position par rapport à des signifiés, des conventions formelles et expressives propres à une époque et qui sont par conséquent historiquement marquées, et ne pas les reconnaître, les identifier, même intuitivement, au moment d’écouter, analyser ou exécuter une œuvre, c’est s’exposer à une mauvaise interprétation, c’est-à-dire manquer un sens plausible. Exécuter une mélodie grégorienne sans connaissance d’aucune sorte, même simplement auditive, ne peut mener qu’à un désastre, ou dans le meilleur des cas à autre chose qu’à du chant grégorien, tout en étant peut-être une réussite sur un plan purement esthétique. Il en est de même pour tout genre de musique. Un bel exemple de ce dialogue engagé au niveau de l’œuvre elle-même, et qui correspondrait aux deux premiers niveaux proposés par Jean Bollack, est donné par certains cours d’interprétation, que l’on peut dès lors assimiler à un véritable travail de philologie, dans la mesure où le professeur mène l’élève sur la voie d’un déchiffrement qui, confronté à la résistance de la partition mais aussi à des erreurs ou des habitudes discutables, ouvre à un sens premier, ou du moins qui est acceptable comme tel, car plausible. L’analyse musicale peut faire de même lorsqu’elle consent à être autre chose que simplement descriptive et qu’elle s’intéresse à la manière dont le discours s’est constitué, et éventuellement aussi aux autres possibilités négligées ou peut-être utilisées ailleurs contre lesquelles il s’est constitué. De fait, l’analyse se fait aussi en creux, en s’intéressant à ce que l’œuvre n’a pas fait, ou aurait pu faire autrement, car, d’une certaine manière, l’analyse en plein, dans laquelle n’est considéré que ce qui est effectivement présent, est une sorte d’imposture, ou au moins d’utopie, car ce qui est là ne prend vraiment sens qu’en fonction de ce qui ne l’est pas, mais qui aurait pu l’être…

14Finalement, entrer en dialogue avec une œuvre ne peut se faire qu’en entrant aussi dans le dialogue dont l’œuvre est la réponse. C’est le prix à consentir pour être apte à recevoir quelque chose d’elle, quelque chose d’autre, de différent, de singulier, qui ne vient pas de nous, mais réellement d’elle, sans lui faire dire ce qu’elle ne dit pas… Une familiarité doit s’installer entre l’œuvre et nous, une complicité, une connivence, – une intelligence. De fait, je fais vivre le sens et le sens fait vivre quelque chose en moi, ou le fait revivre de manière nouvelle et singulière, et dans tous les cas en fonction d’attentes et de besoins qui me sont propres à un moment donné. Certes, il n’y a pas dans l’œuvre un sens à découvrir, mais un sens plausible parmi d’autres : une même œuvre « comporte plusieurs traits, ou faisceaux de traits, qui peuvent conduire à plusieurs assignations, et donc à plusieurs interprétations non pas incertaines, mais également plausibles, fondées sur des “perceptions” également correctes, quoique sans doute incompatibles dans l’instant […] »16. Et parmi ces sens plausibles, il en est sans doute qui le sont plus que les autres, car avant les autres : ils sont liés à une compétence qui permet à un comprendre, même encore partiel et imparfait, de se mettre en place, un comprendre premier, préalable à toute analyse, à tout connaître17. Ce comprendre premier saisit un ensemble – un monde – à partir d’informations parcellaires, en dépassant donc le stade d’une perception éclatée ; comme un noyau qui irradie du sens, en général insuffisant, mais nécessaire, car il sert de fondement à la compréhension à venir, plus fine, plus exhaustive, parfois décevante, aussi, et lorsque ce premier niveau de compréhension n’existe pas, pour des œuvres qui nous sont par exemple complètement étrangères, tout est à construire, donc à apprendre, c’est-à-dire qu’il nous faut (re)découvrir des clés, des conventions plus ou moins tacites et propres à une culture précise, des conventions d’ailleurs essentiellement expressives.

15En effet, d’après Daniel Charles, qui cite Mikel Dufrenne, la cohérence d’une œuvre d’art ne provient pas de ce qu’elle « représente » mais de ce qu’elle « exprime » : « En ce qui concerne l’art, le “principe d’unité” vient […] de la capacité de l’œuvre à signifier “non seulement en représentant”, mais “à travers” la représentation, “en manifestant une certaine qualité que le discours ne peut traduire, mais qui se communique en éveillant un sentiment. Cette qualité propre à l’œuvre ou aux différentes œuvres d’un même auteur, ou d’un même style, est une atmosphère de monde. Comment est-elle produite ? Par l’ensemble dont elle émane : tous les éléments du monde représenté, selon le mode de leur représentation, conspirent à la produire.” Le monde de l’expression n’est donc unitaire que parce qu’il est unique. Et c’est la puissance du singulier que de faire tache d’huile ». De fait, « l’expression telle que la conçoit Mikel Dufrenne est contagieuse. Autrement dit, ses contours sont indécis, ce qui interdit toute saisie du dehors, toute sommation stricte, et même toute appréhension analytique. C’est qu’elle relève de la seule “logique du sentiment”. Bref, elle se veut “totalité interne”. Paradoxalement, donc, par son inexactitude même, l’expression, totalité interne mobile et désenclavée, communique à ce qu’elle investit la plus resserrée des cohérences : c’est que le monde dans lequel elle s’épanche lui est entièrement homogène et consubstantiel, et qu’elle s’y est insinuée et répandue comme une “atmosphère”. Monde de type “einsteinien” (“à la fois fini et illimité”), et qui s’ouvre “plutôt en intension qu’en extension” »18. Et seule une grande intelligence avec l’œuvre considérée dans sa dimension historique permet de saisir pleinement ce « monde de l’expression », intelligence qu’il est impensable d’acquérir sans une connaissance approfondie du style et de la culture dont cette œuvre relève, sans, par conséquent, avoir déjà entretenu un dialogue poussé avec une ou plusieurs œuvres voisines…

16Enfin, dans notre expérience de l’art, n’y a-t-il pas aussi ces « présences réelles » dont parle George Steiner, même si nous ne les entendons pas ici au sens religieux : « Cet essai avance l’argument d’un pari sur la transcendance. Il avance que tout acte d’art – comme sa réception –, que toute expérience de la forme pleine de sens implique le présupposé d’une présence ». Car s’il n’y avait rien, l’art ne serait « que jeu trivial et la mort une contingence statistique »19. Ce que, il est vrai, on serait parfois tenté de croire : comme si les « splendeurs situées derrière le tombeau » chères à Baudelaire n’étaient que des lubies d’esprits ringards, et si c’était effectivement le cas, nous ne pourrions que constater avec la plus grande sérénité que nous en faisons partie…

« C’est cet admirable, cet immortel instinct du beau qui nous fait considérer la terre et ses spectacles comme un aperçu, comme une correspondance du Ciel. La soif insatiable de tout ce qui est au delà, et que révèle la vie, est la preuve la plus vivante de notre immortalité. C’est à la fois par la poésie et à travers la poésie, par et à travers la musique que l’âme entrevoit des splendeurs situées derrière le tombeau ; et quand un poème exquis amène les larmes au bord des yeux, ces larmes ne sont pas la preuve d’un excès de jouissance, elles sont bien plutôt le témoignage d’une mélancolie irritée, d’une postulation des nerfs, d’une nature exilée dans l’imparfait et qui voudrait s’emparer immédiatement, sur cette terre même, d’un paradis révélé »20.

17.

Notes   

1  Cf. Georges Steiner, Réelles présences. Les arts du sens [1989], trad. fr., Paris, Gallimard, 1991, p. 186.

2  Ibid., p. 187-189.

3  Ibid., p. 176.

4  Lucien Braun, « À propos d’Hermès », Approches herméneutiques de la musique, J. Viret, éd., Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2001, respectivement p. 2, 6 et 5.

5  Paul Ricœur, Du Texte à l’action. Essais d’herméneutique II, Paris, Seuil, 1986, p. 117.

6  Paul Ricœur, Réflexion faite. Autobiographie intellectuelle, Paris, Éditions Esprit, 1995, p. 74.

7  Paul Ricœur, cité in Jean Grondin, L’Horizon herméneutique de la pensée contemporaine, Paris, Vrin, 1993, p. 187.

8  Ricœur, Du Texte à l’action, op. cit., p. 156.

9  Gérard Genette, L’œuvre de l’art. 2. La Relation esthétique, Paris, Seuil, 1997, p. 220.

10  Steiner, op. cit., p. 170.

11  Cf. Michael Baxandall, Formes de l’intention. Sur l’explication historique des tableaux, trad. fr., Paris, Éditions Jacqueline Chambon, 1991.

12  Daniel Charles, « Herméneutique musicale et cosmologie », Iannis Xenakis-Gérard Grisey. La Métaphore lumineuse, M. Solomos, dir., Paris, L’Harmattan, 2003, p. 22.

13  Cf. Jorge Luis Borges, Pierre Ménard, auteur du « Quichotte », in Œuvres Complètes I, trad. fr., Paris, Gallimard (« Bibliothèque de la Pléiade »), 1993, p. 467-475.

14  Cf. Genette, op. cit.

15  Cf. Jean Bollack, Sens contre sens. Comment lit-on ?, Paris, Éditions la passe du vent, 2000.

16  Genette, op. cit., p. 220.

17  Cf. mon article « Au-delà de l’utopie, se comprendre… (Autour d’une herméneutique musicale) », Imaginaire et utopies du XXIe siècle, Marc Jimenez, éd., Éditions Klincksieck, 2003.

18  Daniel Charles, La Fiction de la postmodernité, selon l’esprit de la musique, Paris, Presses Universitaires de France, 2001, p. 190, 191, 192-193.

19  Steiner, op. cit., p. 255 et 15.

20  Baudelaire, cité par George Steiner, op. cit., p. 11 (in « Notes nouvelles sur Edgar Poe », Œuvres complètes, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1976,p. 334).

Citation   

Christian Hauer, «Du sens, ou rien…», Filigrane. Musique, esthétique, sciences, société. [En ligne], Numéros de la revue, Musicologies ?, mis à  jour le : 16/06/2011, URL : https://revues.mshparisnord.fr:443/filigrane/index.php/docannexe/file/649/docannexe/file/652/index.php?id=76.

Auteur   

Quelques mots à propos de :  Christian Hauer

Titulaire d’une thèse de doctorat sur Schönberg soutenue en 1994 à l’Université d’Aix-Marseille 1, Christian Hauer consacre par la suite l’essentiel de ses travaux au développement d’une herméneutique de la création et de la réception musicales. Nommé professeur à l’Université de Lille 3 en 2002, il y œuvre en tant que membre du Centre d’Etude des Arts Contemporains et directeur de l’UFR Arts et Culture.