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Théma n°5 L’inconscient freudien : «en-trop-au-logis» du corps ?

 

 

L’inconscient freudien : « en-trop-au-logis » du corps ?

                                              

 

« C'est faux de dire: Je pense: on devrait dire

 on me pense. –Pardon du jeu de mots ».

Arthur Rimbaud

 

 

Ce cinquième numéro de Cultures-Kairós veut donner la parole à des chercheuses et des chercheurs qui étudient les théories psychanalytiques afin de mieux comprendre la vie en société. Nous les invitons à s’exprimer sur les conséquences et les enjeux méthodologiques, épistémologiques et heuristiques de la découverte de l’inconscient pour la recherche anthropologique.

 

En effet, comme l’ont noté Juillera, Galinier et Bidou (1999), le fréquent rejet de la psychanalyse par les sciences sociales est disproportionnel à la portée de ses résultats, à la rigueur de ses démonstrations et à la pertinence des pistes de réflexion qu'elle soulève. Assez souvent balayée d’un revers de main, la psychanalyse semble être « en-trop-au-logis » des sciences sociales. Le jeu de mots cherche certes à provoquer un sourire qui serait une forme de reconnaissance de la trivialité des attitudes de défense, et, par voie de conséquence, un premier pas vers un assouplissement des frontières disciplinaires. Il suggère aussi que la psychanalyse peut travailler l’anthropologie de façon à renouer avec le projet maussien d’étude de « l’homme total », entendu comme articulation « physio-psycho-sociale » (Mauss [1936], 1999, p. 384). Certainement faut-il en entendre encore un peu plus dans le titre de ce numéro : Freud n’a-t-il pas devancé Mauss dans la construction épistémologique d’une anthropologie du corps ? L’angle de lecture à partir duquel les anthropologues lisent le texte freudien ne fait-il pas l’impasse sur ce que Freud a élaboré de plus pertinent concernant l’articulation du corps et du langage ?

En effet, l’attitude de nombreux chercheurs en sciences sociales apparaît étrange lorsque l'on remarque que, comme Freud et Lacan, la plupart des chercheurs en psychanalyse s'intéressent à l'anthropologie : ils la commentent, la critiquent, en tiennent compte dans leur pratique, leurs débats et leurs réflexions. Pour prendre un exemple frappant de cette dissymétrie, on notera que la lecture critique de l’œuvre de Lévi-Strauss par Lacan est pratiquement inconnue en sciences sociales, alors qu'elle touche le cœur même de la théorie structuraliste : la prohibition et l’échange. Ainsi Carina Basualdo (2011) montre-t-elle en détail comment Lévi-Strauss a d’une part dénié les thèses freudiennes (soit une reconnaissance intellectuelle et un rejet affectif), et d’autre  part  refusé  de  lire  Lacan,  qui  pourtant  élaborait une théorie du symbolique à partir de références théoriques communes (Hegel, Marx, Durkheim, Freud, Saussure, Mauss, Jakobson, par exemple). Cette dissymétrie laisse comprendre que l'idée d'un recoupement de la psychanalyse et de l'ethnologie au sein de la linguistique, proposée par Foucault à la fin de Les mots et les choses, semble avoir été plus envisagée par les psychanalystes que par les anthropologues.

 

Inventée par Freud alors que sociologie et anthropologie gagnaient leur légitimité scientifique, la psychanalyse a pourtant largement contribué à déconstruire tant la conception de « l'homme » que celle de l’individu ou du civilisé. La circulation du langage hors des cadres de la communication, son effet sur les corps, ce qu'elle cause de troubles et de liens sociaux en-deçà de la volonté, a été une découverte bouleversante. À partir des dires de ses patient-e-s Freud a découvert un travail inconscient qui noue le corps et le langage par la voie du désir. Selon cette approche, le désir singulier de chacun vient du dehors et fait lien dans le quiproquo. Au point où psychologie et sociologie semblent tourner court, au dernier maillon de la chaîne des déterminations sociologiques, Freud démontre qu'il y a un « après-coup » à la pulsion et que celle-ci ne saurait relever de la causalité biologique ni se terrer dans les profondeurs du psychologique. Au moment où l'anthropologie classique risque la continuité entre structure sociale et structures du monde (Lévi-Strauss, 1974, p. 231), Freud découvre encore plus de langage[1], plus de « pensée » et plus d'anthropos: du sens dans le non-sens et de l’illogique dans le logique (Cassin, 2012, p. 138). L’inconscient freudien ne se réduit donc pas à du non-conscient (lois universelles pour Lévi-Strauss, op. cit., p. 233), car il dépend du langage et travaille à la « jouis-sens » du corps au cœur du lien social.

 

À la base des difficultés de dialogue entre les deux disciplines, existe une différence importante : prendre ou ne pas prendre en compte la néoténie (situation de prématurition et de dépendance du nouveau-né) pour étudier l’humain. Il semble en effet que pour les sciences sociales, la question de « comment un corps qui naît devient un corps qui parle » est élidée par le recours à la rhétorique de l'apprentissage, de l'incorporation ou de la socialisation de l’individu. Or, pour la psychanalyse freudienne et lacanienne l’apprentissage ne peut avoir lieu sans l’expérience primordiale du nouveau-né, marquée par la perte et par le désaide. En amont de l'acquisition, la relation à l’autre cause une division, qui enclenche la dynamique de la subjectivation. Entrer dans le langage, être sujet, est avant tout un mal-être (que l'ethnographe vit et observe aussi), un mal-devenir, une division conflictuelle opérée par la relation à l'Autre. Le sujet n'est pas simplement produit par le social, il est un effet de l'articulation entre le langage et un corps, il n'est pas tant mû par un impératif social que par un manque (de corps) causé et entretenu par la culture. Au cœur des déterminismes sociologiques, il peut donc être pertinent de considérer une dialectique où la culture joue à la fois le rôle d’agresseur (provoquant le mal-être) et de sauveur (fournissant des idéaux). En partant du manque, il paraît possible de sortir de la dichotomie individu/société afin d’éclairer les ressorts dont dispose le sujet pour s’inscrire dans le registre signifiant. En considérant que la culture retranche au sujet sa plénitude tout en lui offrant des leurres susceptibles de l'apaiser, les processus de subjectivation peuvent gagner une explication qui rende compte de la conflictualité propre au sujet. Si la question de l'acquis sociologique est ici relativisée, c'est pour mieux avancer l’idée que le lien social n'est pas seulement partage, échange, circulation ou injonction normative, mais qu'il est aussi manque, déplaisir, ratage, quiproquo et jouis-sens.

 

Au cœur de la problématique de la subjectivation, nous pouvons repérer un point à propos duquel les approches anthropologiques et psychanalytiques maintiennent leur écart. En effet, l'agressivité se situe de façon distincte dans le champ de l’observation si elle est considérée comme un accident du social –voire comme sa négation– ou comme corrélative des mécanismes d'identification, c'est-à-dire comme moteur de la culture (Lacan, 1966[2]). Pourtant, l'agressivité est centrale dans l’œuvre de Mauss, et en particulier dans l'Essai sur le don. Selon Karsenti (1994 ; 1997) Mauss se sépare du kantisme de Durkheim sur la question des rapports entre « représentations individuelles » et « représentations collectives », de façon à éviter tout rabattement d'une sphère sur l'autre. En s’écartant d’une vision où « la société » aurait fonction d’impératif catégorique, il renouvela l'approche du corps. Pour Karsenti (1994, p. 33), on observe une profonde ressemblance entre les vues de Mauss et le cours de Kojève sur « la dialectique du maître et de l'esclave » chez Hegel – cours auquel Lacan assista et qui l’aida à formuler la « dialectique du désir ». En effet, le don maussien articule liberté et obligations, plaisir de prendre ou de donner et contrainte, plaisir esthétique et violence, dette, lien social et mort, conscience et perte. Ici, le social n'a donc pas grand-chose d'un contrat ou d'un accord, et l'on peut considérer que la lecture de Lévi-Strauss a passablement minimisé l'importance que la violence et la dette revêtaient pour Mauss dans l'échange. Par conséquent, comme le souligne Karsenti (op. cit., p. 74), malgré ses réticences vis-à-vis de Totem et Tabou il y a un accord de fond, une ressemblance –non une influence– entre Mauss et Freud. Si pour le premier l'être parlant est pris comme un « donné », un « fait »  dont on part pour aborder la réalité (Mauss, 1999, p. 274-276), pour le second, la cure analytique épingle la singularité discursive « d'un » qui souffre –corporellement– d'être social, et qui ne sait trop que faire de la charge violente que promeut le malaise dans la culture.

 

Le présent numéro invite donc à considérer qu'une brèche, qu'un « non-rapport épistémologique » (Basulado, 2011, p. 217), s'est établit entre anthropologie et psychanalyse, et que sa prise en compte intéresse l'anthropologie du corps et du sensible. Avec le rejet de Freud et de Lacan par Lévi-Strauss, l'anthropologie française a laissé de côté une piste fondamentale des travaux de Mauss. Or, cette piste travaille la psychanalyse depuis ses débuts dans la mesure où le don y apparaît comme un phénomène langagier qui enlace les pulsions dans la trame symbolique. Concernant « les pulsions et leurs destins » (Freud [1915], 1968), il faut reconnaître que la psychanalyse a pris les devants et que de ce fait, son approche du corps est plus complexe, mais aussi plus éprouvée. La timidité de la confrontation aux textes freudiens et lacaniens par les anthropologues apparaît ici comme une vraie lacune méthodologique. Car le corps, ou plutôt l'articulation d'un corps et du langage, a été inlassablement étudié depuis la découverte freudienne.

 

 

Nous adressons cet appel à des chercheuses et des chercheurs qui font usage de façon rigoureuse de la psychanalyse pour lire la vie sociale, ainsi qu'à ceux qui pourraient rendre compte d'une critique informée vis-à-vis de cet usage. C'est bien à un certain intérieur de la psychanalyse que nous voulons donner la parole, car il y a des faits et des mécanismes, des problématiques et des résultats, issus de l’orientation psychanalytique, qui intéressent la construction d'une anthropologie du sensible, initiée par Marcel Mauss.

 

À titre indicatif, nous suggérons les pistes suivantes:

-Champs, domaines, objets de recherches et auteurs clefs ;

-Clinique et anthropologie ;

-Descriptions ethnographiques d'inspiration psychanalytique ;

-Histoires et actualités des dialogues entre anthropologie et psychanalyse ;

-Mise en perspective des concepts, problématisations, méthodes, résultats des deux disciplines ;

-Répondre aux « provocations » des psychanalystes, par exemple celle-ci:

« Ce n'est pas la psychanalyse qui peut servir à procéder à une enquête ethnographique. Cela dit, ladite enquête n'a aucune chance de coïncider avec le savoir autochtone, sinon par référence au discours de la science. Et malheureusement, ladite enquête n'a aucune espèce d'idée de cette référence, parce qu'il lui faudrait la relativer. Quand je dis que ce n'est pas par la psychanalyse qu'on peut entrer dans une enquête ethnographique, j'ai surement l'accord de tous les ethnographes. Je l'aurai peut-être moins en leur disant que, pour avoir peut-être une petite chance de faire une juste enquête ethnographique, il faut, je répète, non pas procéder par la psychanalyse, mais peut-être, si cela existe, être un psychanalyste » (Lacan, 1991, p. 104. Souligné par nous).

 

 

Organisateurs : Romain Bragard et Mariana Leal de Barros

 

 

Bibliographie :

ALLOUCH, Jean, Freud et puis Lacan, Paris : EPEL, 1993.

AYOUCH, Thamy,« Le corps, un témoin ? Psychanalyse et différence des sexes », Recherches en Psychanalyse, v. 15, Paris : Université Denis Diderot/ Sorbonne, 1/2013, p. 49-59, Disponible en ligne : http://www.repsy.org/numero_revue/

BAIRRÃO, José, « A Propósito do Outro, Etnográfico e em Psicanálise». Revista de Filosofia: Aurora, v. 23, Curitiba: PUCPR, 2011, p. 345-358.

BASUALDO, Carina, Lacan (Freud) Lévi-Strauss. Chronique d’une rencontre ratée, Lormont: Le bord de l’eau, 2011.

BASUALDO, Carina, BRAUNSTEIN, Nestor, FUKS, Betty (dir.), Totem et tabou. Cent ans après, Lormont : Le Bord de l'eau, 2013.

CASSIN, Barbara, Jacques le Sophiste. Lacan, logos et psychanalyse, Paris : EPEL, 2012.

FASSIN, Éric, « L’inversion de la question homosexuelle », Revue française de psychanalyse, v. 67, Paris : PUF, 1/2003, p. 263 – 284. Disponible en ligne : www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-1-page-263.htm.

FREUD, Sigmund [1915] « Pulsions et destins des pulsions », dans Métapsychologie, Paris : Gallimard, 1968, p. 11-43.

FREUD, Sigmund, Malaise dans la culture, Paris : PUF, 1995.

GEFFRAY, Christian, Le nom du Maître. Contribution à l’anthropologie analytique, Paris : Arcanes, 1997.

HABER, Stéphane, Freud sociologue, Paris : Le bord de l'eau, 2012.

JUILLERAT, Bernard, GALINIER, Jacques, BIDOU, Patrice, « Argument », dans L’homme, n° 149, tome 39, Paris : EHESS, janvier-mars 1999, pp. 7-23.

KARSENTI, Bruno, Marcel Mauss. Le fait social total, Paris : PUF, 1994.

KARSENTI, Bruno, L’homme total. Sociologie, anthropologie et philosophie chez Marcel Mauss, Paris : PUF, 1997.

LEVI-STRAUSS, Claude, « L’efficacité symbolique », dans Anthropologie structurale, Paris : Plon, 1974, p. 213-234.

LACAN, Jacques, « L'agressivité en psychanalyse », dans Écrits, Paris : Seuil, 1966, p 100-123.

LACAN, Jacques, Le séminaire livre XVII. L’envers de la psychanalyse, Paris : Seuil, 1991.

MAUSS, Marcel, Sociologie et anthropologie, Paris : PUF, 1999.

MILLER, Jacques-Alain, « Biologie lacanienne et événement de corps », La cause freudienne,n°44, février 2000, Paris : Navarin Seuil, p. 7-56.

PULMAN, Bertrand, Anthropologie et psychanalyse. Malinowski contre Freud, Paris : PUF, 2002.

PRADELLES DE LATOUR, Charles-Henry, La dette symbolique. Thérapies traditionnelles et psychanalyse, Paris : EPEL, 2014.

RECHTMAN, Richard. « Retour sur l’efficacité symbolique », dans DRACH, Marcel, & TOBOUL, Bernard (dir.), L’anthropologie de Lévi-Strauss et la psychanalyse. D’une structure à l’autre, Paris : La Découverte, 2008, p. 179-195.

 

 

Envoi des contributions : avant le 30.03.2015

 

aux deux adresses suivantes :

laure.garrabe@mshparisnord.fr & veronique.muscianisi@mshparisnord.fr

 

Les textes qui ne seront pas aux normes seront systématiquement refusés.

Les normes typographiques complètes sont accessibles sur le lien suivant :

http://revues.mshparisnord.org/cultureskairos/index.php?identifier=consignesauxauteurs

 

Les propositions de contribution (40-50 000 signes) doivent comporter en outre :

- 5 mots-clés en français ou portugais et en anglais.

- un résumé en français ou portugais et un résumé en anglais.

- une brève notice biographique de l’auteur sur fichier séparé (Nom de l’auteur, titre et institution de rattachement, brève présentation et intérêts des recherches)

 

Cultures-Kairós reçoit aussi en flux continu :

- des contributions libres qu’elle publie dans la rubrique « Varia », dans la mesure où elles concernent les intérêts de sa ligne éditoriale.

- des comptes rendus critiques d’ouvrages qu’elle publie dans la rubrique « Recensions », dans la mesure où ils concernent les intérêts de sa ligne éditoriale.



[1]Sur la résistance de la psychanalyse à l'hylozoïsme, voir Allouch (1993) et Miller (2000).

 

[2]Ce texte, qualifié de « profonde étude du Docteur Jacques Lacan » est cité en note de bas de page par Lévi-Strauss dans l'introduction à l'Œuvre de Marcel Mauss. Ce sera la première et dernière référence de l'anthropologue au psychanalyste, qu'il décida de ne pas lire.

 

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« Está errado dizer: Eu penso. Deveríamos dizer:

Pensam-me. Perdão pelo jogo de palavras ».

Arthur Rimbaud

 

 

Este número abre espaço a pesquisadoras e pesquisadores que estudam as teorias psicanalíticas em amplitude ao social. O convite é para que abordem as implicações metodológicas, epistemológicas e heurísticas da descoberta do inconsciente para a pesquisa antropológica.

 

Como sublinhado por Juillera, Galinier et Bidou (1999), é notável como a rejeição da psicanálise pelas ciências sociais é desproporcional ao alcance dos seus resultados, ao rigor de suas discussões e à pertinência de pistas de reflexão que ela oferece. Frequentemente deixada de lado, a psicanálise, entretanto, parece estar em demasia nas ciências sociais. O trocadilho[1]busca provocar um sorriso que atestaria o reconhecimento da trivialidade dos mecanismos de defesa, e, consequentemente, incitar um primeiro passo à flexibilização das fronteiras disciplinares. Ele também sugere que a psicanálise pode contribuir para a antropologia de maneira a reconectá-la ao projeto maussiano de estudo do « homem total, entendido como articulação « fisio-psico-social » (Mauss [1936], 1999 p. 384). Certamente, também, é possível ouvir no título deste número um questionamento: Freud não teria ultrapassado Mauss na construção epistemológica de uma antropologia do corpo? Em que medida a leitura que os antropólogos fazem dos textos freudianos deixa de lado o que Freud elaborou de mais pertinente sobre a articulação corpo-linguagem?

 

Com efeito, é de se estranhar a frequente indiferença dos cientistas sociais pelos textos psicanalíticos quando notamos que, como Freud e Lacan, grande parte dos pesquisadores em psicanálise se interessam pela antropologia: eles a discutem, a criticam, além de considerá-la em suas práticas, discussões e reflexões. Para citar um exemplo paradigmático desta dissimetria, podemos notar que a crítica lacaniana da obra de Lévi-Strauss é praticamente desconhecida nas ciências sociais, apesar de tocar o coração da teoria estruturalista: a interdição e a troca. Neste sentido, Carina Basualdo (2011) mostra passo a passo como Lévi-Strauss por um lado denegou as teorias freudianas (ou seja: operou um reconhecimento intelectual associado a uma rejeição afetiva), e por outro lado, se recusou a ler Lacan, o qual, no entanto, desenvolvia uma teoria do simbólico a partir de referências teóricas comuns (Hegel, Marx, Durkheim, Freud, Saussure, Mauss, Jakobson, por exemplo). Esta dissimetria permite com que compreendamos que a ideia de uma aproximação da psicanálise e da etnologia no seio da linguística, proposta por Foucault ao final de As palavras e as Coisas, parece ter sido melhor considerada pelos psicanalistas do que pelos antropólogos.

 

Inventada por Freud no período em que a sociologia e a antropologia conquistavam legitimidade científica, a psicanálise contribuiu muito para desconstruir tanto a noção de « homem », quanto a de indivíduo ou civilizado. A circulação da linguagem por fora do âmbito da comunicação, seu efeito sobre os corpos, sua capacidade de provocar tanto perturbações quanto vínculos sociais aquém do controle dos sujeitos, foi uma descoberta revolucionária. A partir dos ditos de seus pacientes, Freud descobriu um trabalho do inconsciente que articula o corpo e a linguagem pela via do desejo. Segundo esta abordagem, o desejo de cada um vem de fora, o que implica que o vínculo social também é feito de quiproquó e jogo de engodo. No ponto em que psicologia e sociologia esgotam-se, no último anel da cadeia dos determinismos sociológicos, Freud demostra que a pulsão não se restringe ao biológico nem se reduz à uma interioridade psicológica. Enquanto a antropologia clássica se arisca a postular uma continuidade entre estrutura social e estruturas do mundo (Lévi-Strauss, 1974, p. 231), Freud descobre ainda mais linguagem[2], mais « pensamento »e mais antropos: encontra senso no não-senso e ilógico no lógico (Cassin, 2012, p. 138). O inconsciente freudiano não se reduz ao não-consciente (regras universais para Lévi-Strauss, op. cit., p. 233), pois depende da linguagem e trabalha para a « jouis-sens »(goze-sentido)[3], do corpo no cerne do laço social.

 

Na origem da dificuldade de diálogo entre as duas disciplinas, existe uma diferença importante: levar em conta ou não a neotenia (situação de prematuração e dependência do recém-nascido) para compreender o humano. Parece que para as ciências sociais, a questão de « como um corpo que nasce se torna um corpo que fala »se restringe no recurso à retórica da aprendizagem, da assimilação ou da socialização do indivíduo. Já para a psicanálise freudiana e lacaniana, a aprendizagem depende da experiência primordial do recém-nascido, marcada pela falta e pelo desamparo. Antes de qualquer aquisição, a relação com o outro causa uma divisão que desencadeia o processo de subjetivação. Entrar no âmbito da linguagem, ser sujeito, é antes de tudo um mal-estar (que o etnógrafo também vive e observa), um mal-devir, uma divisão conflituosa operada pela relação com o Outro. O sujeito não é simplesmente produzido pelo social, ele é efeito de articulação entre a linguagem e um corpo. Mais do que um imperativo social, o que o move é a falta (de corpo) causada e operada pela cultura. No coração dos determinismos sociológicos, pode então ser pertinente considerar uma dialética em que a cultura ora protagoniza o papel do agressor (provocando o mal-estar) ora o do Salvador (oferecendo ideais). A ideia da falta possibilita, justamente, sair da dicotomia indivíduo/ sociedade a fim de compreender os recursos dos quais o sujeito dispõe para se inscrever no registro do significante. Considerando que a cultura subtrai do sujeito a sua plenitude ao mesmo tempo em que lhe oferece ilusões capazes de lhe apaziguar, os processos de subjetivação podem se beneficiar de uma compreensão que leva em consideração o conflito próprio do sujeito. Se a questão da aquisição como processo sociológico é aqui relativizado, é para avançarmos melhor na ideia de que o laço social não é somente partilha, troca, circulação ou injunção normativa, mas que também é falta, desprazer, perda, quiproquó e gozo (jouis-sens).

 

No cerne da problemática da subjetivação, nós podemos localizar um ponto em que as abordagens antropológicas e psicanalíticas mantêm suas divergências. Com efeito, a agressividade se situa de maneira distinta no campo da observação se ela é considerada como um acidente do social – ou mesmo a sua negação – ou como correlativa de mecanismos de identificação, ou seja, como motor da cultura (Lacan, 1966[4]). No entanto, a agressividade é central na obra de Mauss, e mais particularmente no Ensaio sobre a dádiva. Segundo Karsenti (1994; 1997), Mauss se diferencia do kantismo de Durkheim a respeito das relações entre « representações individuais »e « representações coletivas », de maneira a evitar a sobreposição desta esfera sobre a outra. Distanciando-se de uma visão em que « o social » teria função de imperativo categórico, ele renovou a abordagem do corpo. Para Karsenti (1994, p. 33), observamos uma profunda semelhança entre o ponto de vista de Mauss e o curso de Kojève sobre a « dialética do senhor e do escravo » em Hegel – curso assistido por Lacan e que o ajudou a formular a « dialética do desejo ». Com efeito, a dádiva maussiana articula liberdade com obrigação, prazer de dar e receber com coação, prazer estético com violência, dívida e laço social com morte, consciência com perda. Aqui, o social tem pouco a ver com um contrato ou um acordo, e podemos considerar que a leitura de Lévi-Strauss minimizou bastante a importância que a violência e a dívida tinham para Mauss na compreensão da troca. Consequentemente, como ressalta Karsenti (op. cit., p. 74), apesar de suas reservas em relação à Totem e Tabu, há uma concordância de fundo, uma semelhança –não uma influência– entre Mauss e Freud. Se para o primeiro o ser falante é tomado como um « dado », um « fato » a partir do qual abordamos a realidade (Mauss, 1999, p. 274-276), para o segundo, a cura analítica conjuga a singularidade discursiva « de um » que sofre – corporalmente – do ser social, e que não sabe muito o que fazer com a carga violenta que o mal-estar na cultura promove.

 

Portanto, este número da revista Culture Kairós vos convida a considerar que uma « não-relação epistemológica » (Basulado, 2011, p. 217) se estabeleceu entre antropologia e psicanálise, e que retomá-la interessa à antropologia do corpo e do sensível. Com a rejeição de Freud e de Lacan por Lévi-Strauss, a antropologia francesa deixou de lado um eixo fundamental dos trabalhos de Mauss. Ora, este é tratado pela psicanálise desde o seu início, na medida em que a dádiva aparece como fenômeno « linguajeiro » que enlaça as pulsões na trama do simbólico. Em relação a « As Pulsões e seus destinos » (Freud, [1915], 1968), é preciso reconhecer que a psicanálise se antecipou, e por isso, sua abordagem do corpo é não apenas mais complexa, mas também mais « experimentada ». A timidez das confrontações com os textos freudianos e lacanianos pelos antropólogos aparece aqui como uma verdadeira lacuna epistemológica, pois o corpo, ou melhor, a articulação entre um corpo e a linguagem, foi incansavelmente estudada desde a descoberta freudiana.

 

Assim, nós endereçamos este convite à pesquisadoras e pesquisadores que utilizam a psicanálise na leitura da vida social, assim como àqueles que poderiam oferecer uma crítica informada em relação a este uso. É a um certo interior da psicanálise que nós queremos dar a palavra, pois há fatos e mecanismos, problemáticas e resultados, oriundos da orientação psicanalítica, que interessam a construção de uma antropologia do sensível, iniciada por Marcel Mauss.

 

Nós sugerimos as seguintes pistas:

 

-Campos, domínios, objetos de pesquisa e autores chave.

-Clínica e antropologia,

- Descrições etnográficas de inspiração psicanalítica.

- Histórias e atualidades de diálogos entre antropologia e psicanálise.

-Apresentação de conceitos, problematizações, métodos, resultados na articulação entre as duas disciplinas.

-Responder às « provocações »psicanalíticas, por exemplo a seguinte:

« Não é a psicanálise que pode servir para proceder a uma pesquisa etnográfica. Dito isto, a tal pesquisa não tem chance alguma de coincidir com o saber autóctone, a não ser em referência ao discurso da ciência. E, infelizmente, a tal pesquisa não tem a menor ideia dessa referência, porque teria que relativizá-la. Quando digo que não é pela psicanálise que se pode entrar numa pesquisa enográfica, todos os etnógrafos estariam certamente de acordo. Talvez estivessem menos se eu lhes dissesse que, para ter uma pequena ideia da relativização do discurso da ciência, quer dizer, para ter quem sabe uma pequena chance de fazer uma boa pesquisa etnográfica, seria preciso, repito, não proceder pela psicanálise, mas talvez, se isso existir, ser um psicanalista » (Lacan, 1991, p. 102. Grifo nosso).

 

 

Organização: Romain Bragard, Mariana Leal de Barros

 

 

Bibliografia:

ALLOUCH, Jean, Freud et puis Lacan, Paris : EPEL, 1993.

AYOUCH, Thamy,« Le corps, un témoin ? Psychanalyse et différence des sexes », Recherches en Psychanalyse, v. 15, Paris : Université Denis Diderot/ Sorbonne, 1/2013, p. 49-59, Disponível online : http://www.repsy.org/numero_revue/

BAIRRÃO, José, « A Propósito do Outro, Etnográfico e em Psicanálise». Revista de Filosofia: Aurora, v. 23, Curitiba: PUCPR, 2011, p. 345-358.

BASUALDO, Carina, Lacan (Freud) Lévi-Strauss. Chronique d’une rencontre ratée, Lormont: Le bord de l’eau, 2011.

BASUALDO, Carina ; BRAUNSTEIN, Nestor FUKS, Betty (dir.), Totem et tabou. Cent ans après, Lormont : Le Bord de l'eau, 2013.

CASSIN, Barbara, Jacques le Sophiste. Lacan, logos et psychanalyse, Paris : EPEL, 2012.

FASSIN, Éric, « L’inversion de la question homosexuelle », Revue française de psychanalyse, v. 67, Paris : PUF, 1/2003, p. 263 – 284. Disponível online : www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-1-page-263.htm.

FREUD, Sigmund [1915] « Pulsions et destins des pulsions », dans Métapsychologie, Paris : Gallimard, 1968, p. 11-43.

FREUD, Sigmund, Malaise dans la culture, Paris : PUF, 1995.

GEFFRAY, Christian, Le nom du Maître. Contribution à l’anthropologie analytique, Paris : Arcanes, 1997.

HABER, Stéphane, Freud sociologue, Paris : Le bord de l'eau, 2012.

JUILLERAT, Bernard, GALINIER, Jacques, BIDOU, Patrice, « Argument », in L’homme, n° 149, tome 39, Paris : EHESS, janvier-mars 1999, pp. 7-23.

KARSENTI, Bruno, Marcel Mauss. Le fait social total, Paris : PUF, 1994.

KARSENTI, Bruno, L’homme total. Sociologie, anthropologie et philosophie chez Marcel Mauss, Paris : PUF, 1997.

LEVI-STRAUSS, Claude, « L’efficacité symbolique », dans Anthropologie structurale, Paris : Plon, 1974, p. 213-234.

LACAN, Jacques, « L'agressivité en psychanalyse », dans Écrits, Paris : Seuil, 1966, p 100-123.

LACAN, Jacques, Le séminaire livre XVII. L’envers de la psychanalyse, Paris : Seuil, 1991.

MAUSS, Marcel, Sociologie et anthropologie, Paris : PUF, 1999.

MILLER, Jacques-Alain « Biologie lacanienne et événement de corps », La cause freudienne,n°44, février 2000, Paris : Navarin Seuil, p. 7-56.

PULMAN, Bertrand, Anthropologie et psychanalyse. Malinowski contre Freud, Paris : PUF, 2002.

PRADELLES DE LATOUR, Charles-Henry, La dette symbolique. Thérapies traditionnelles et psychanalyse, Paris : EPEL, 2014.

RECHTMAN, Richard. « Retour sur l’efficacité symbolique », dans DRACH, Marcel, & TOBOUL, Bernard (dir.), L’anthropologie de Lévi-Strauss et la psychanalyse. D’une structure à l’autre, Paris : La Découverte, 2008, p. 179-195.

 

 

Envio das contribuições: antes do 30.03.2015

 

aos dois seguintes endereços:

laure.garrabe@mshparisnord.fr& veronique.muscianisi@mshparisnord.fr

 

Os textos que não contemplaram as normas tipográficas estarão sistematicamente recusados.

As normas completas encontram-se no link abaixo:

http://revues.mshparisnord.org/cultureskairos/index.php?identifier=consignesauxauteurs

 

As propostas (40-50 000 caracteres) devem constar:

- 5 palavras-chaves, em português e inglês

- um resumo em português e um resumo em inglês

- e, em arquivo separado, uma breve nota biográfica do autor (Nome completo, titulação, vinculo institucional, breve apresentação dos interesses de pesquisa).

 

Cultures-Kairósrecebe também em fluxo continuo:

- contribuições livres publicadas na rubrica “Varia”, na medida em que contemplam sua linha editorial

- resenhas criticas publicadas na rubrica “Recensions”, na medida em que contemplam sua linha editorial

 



[1]Em francês, ao ouvirmos a palavra « anthropologie » pode escutar « en trop au logis » que significa « em demasia no lar ».

[2]Sobre a resistência da psicanálise ao hilozoísmo, ver Allouch (1993) e Miller (2000).

[3]Trocadilho central na teoria lacaniana: jouissance = gozo; jouis-sens = goze-sentido. Pode-se também entender: J'ouïs-sens = escuto-sentido.

[4]Este texto, nomeado de « Profundo Estudo do Doutor Jacques Lacan » é citado em nota de rodapé por Lévi-strauss na introdução à obra de Marcel Mauss. Esta será a primeira e última referência do antropólogo ao psicanalista, que ele decidiu por não ler.